[VIDÉOS] Ouragan dévastateur (actualisé)

Une semaine après Dorian, les Bahamas face à une longue crise humanitaire

  • Publié le 9 septembre 2019 à 13:09
  • Actualisé le 9 septembre 2019 à 19:07

Entre évacuations, recherches de victimes et risques sanitaires, les Bahamas se préparaient dimanche à faire face à une longue crise humanitaire, une semaine après le passage dévastateur de l'ouragan Dorian, qui a encore causé des dégâts très loin de là, au Canada.

"Il y a beaucoup de morts, beaucoup", affirme Marie-Claude Baptiste, les yeux remplis de larmes. A l'évocation du fléau qui s'est abattu il y a huit jours sur son île de Great Abaco, la femme de 46 ans est submergée par l'émotion. "Tout le monde pleure. Les bébés pleurent, les femmes pleurent, les hommes adultes pleurent. Ils pleurent tous", répète-t-elle. Marie-Claude ignore de quoi sera fait demain. Tout comme les autres membres de sa famille. Iront-ils se réfugier en Floride ? Au Canada ? Ils y pensent, en sachant que, de toute façon, le retour à Abaco est impossible dans l'état actuel des choses.

Le bilan provisoire, livré avec parcimonie par les autorités bahaméennes, n'a pas bougé depuis vendredi soir: 45 morts. Mais les dirigeants de l'archipel ont averti qu'il allait irrémédiablement grimper. Les rescapés interrogés ces derniers jours par l'AFP sur l'île d'Abaco, contre laquelle Dorian s'est acharné pendant de longues heures les 1er et 2 septembre, avec des vents à plus de 250 km/h, laissaient craindre le pire.

"Il y a des morts partout"; "des corps traînent encore", témoignaient-ils en tentant par tous les moyens, bateaux ou avions, de quitter leur île privée d'eau et d'électricité, où les déchets s'amoncelaient au milieu des débris sous une chaleur intense.

Natasha Young, blessée lors du passage de l'ouragan, a été évacuée dès lundi vers Nassau. Sortie de l'hôpital, elle attend depuis sur les quais du port de la capitale bahaméenne l'arrivée de ses proches, dont elle est sans nouvelles. "J'ai retrouvé hier ma mère et ma tante. Nous attendons tous désormais mon frère, mes neveux et nièces et mes enfants", a confié dimanche à l'AFP la jeune femme de 24 ans. "Je n'irai pas dans un refuge tant que la famille ne sera pas réunie."

- Tentes -

Face aux risques sanitaires, le ministère de la Santé bahaméen et l'Organisation panaméricaine de la santé ont tenu à rassurer: aucune épidémie ne frappe actuellement les Bahamas.
"Aucune île des Bahamas n'a été placée en quarantaine", précisent-ils dans un communiqué commun. "Les inondations peuvent potentiellement accroître la transmission de maladies contagieuses liées à l'eau. Néanmoins, aucun cas de choléra n'a été détecté pour le moment, et le nombre de maladies infectieuses n'a pas non plus augmenté."

Dorian a laissé au moins 70.000 personnes sans abri dans les îles les plus sévèrement touchées, Abaco et Grand Bahama, selon l'ONU, dont le Programme alimentaire mondial a acheminé sur place près de 15.000 repas et des tonnes d'équipement.

Par air ou par mer, les sinistrés sont acheminés à Nassau, la capitale et grande ville du pays, d'ordinaire évocatrice de tourisme paradisiaque. Le ferry qui a accueilli les Baptiste transporte de 100 à 200 personnes à chaque trajet. En débarquant, les familles reçoivent un téléphone portable. Souvent, ce téléphone offre pour elles une première occasion de donner des nouvelles à des proches lointains, les infrastructures de communication ayant été gravement endommagées à Great Abaco.

La dévastation va durer "des générations", avait prévenu dès jeudi le Premier ministre des Bahamas Hubert Minnis alors que l'archipel touristique s'apprêtait à affronter une longue crise humanitaire. Il a souligné que Nassau ne pouvait "pas accueillir tous les sinistrés", qui pourraient y être hébergés temporairement sous des tentes. Des Haïtiens, nombreux à vivre dans un bidonville complètement rasé par l'ouragan sur l'île d'Abaco, ont accusé le gouvernement bahaméen d'avoir donné la priorité à ses ressortissants pour les évacuations. "Les Haïtiens ont été bien traités. Si j'avais à choisir entre ma mère et ma belle-mère, vous savez vers où se porterait mon choix (...) Le gouvernement doit d'abord leur trouver un abri", a répondu Dorval Darlier, chargé d'affaires haïtien aux Bahamas.

- Encore actif au Canada -

A des milliers de kilomètres plus au nord, Dorian, après avoir relativement épargné les côtes américaines, a poursuivi sa route au-dessus du Canada, drainant dans son sillage de fortes bourrasques (jusqu'à 140 km/h), des pluies torrentielles et des vagues de près de vingt mètres.
Requalifié en "cyclone post-tropical très intense" par le Centre canadien de prévision des ouragans (CCPO), il a touché terre samedi soir dans la province de la Nouvelle-Ecosse, où près de 400.000 foyers étaient privés d'électricité dimanche matin.

Des arbres ont été déracinés, des lignes électriques sont tombées et une grue s'est effondrée sur un immeuble en construction à Halifax, mais aucun blessé grave n'a été signalé.
Désertées pendant le passage de Dorian, les rues de la ville portuaire de 400.000 habitants, qui abrite la flotte canadienne atlantique, reprenaient vie dimanche au son des tronçonneuses.

Les autorités canadiennes ont indiqué avoir été mieux préparées que pour l'ouragan Juan, qui avait causé des dégâts considérables dans la région en 2003. Quelque 700 soldats aidaient dimanche aux opérations de déblayage, tandis que Dorian se déplaçait au-dessus du golfe du Saint-Laurent avec des vents atteignant encore 120 km/h.

Selon le dernier bulletin du CCPO, il "faiblira lentement à mesure qu'il se déplacera" vers le détroit de Belle Isle entre l'île de Terre-Neuve et la péninsule du Labrador, qu'il doit atteindre plus tard dans la journée. "Toutefois, il continue de produire des vents violents et de la pluie au nord et à l'ouest de la trajectoire", ont mis en garde les météorologues canadiens.

AFP

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