Les dirigeants ont été reconnus coupables de "direction d'organisation criminelle"

La justice grecque refuse toute indulgence envers le parti néonazi Aube dorée

  • Publié le 12 octobre 2020 à 15:16
  • Actualisé le 12 octobre 2020 à 15:39

La Cour pénale d'Athènes a rejeté lundi toutes les circonstances atténuantes susceptibles d'alléger les peines de prison encourues par les dirigeants du parti néonazi Aube dorée, reconnus coupables la semaine dernière de "direction d'organisation criminelle".

Le chef d'Aube dorée Nikos Michaloliakos, négationniste et admirateur du national-socialisme, ainsi que six autres cadres du parti néonazi dont l'eurodéputé Ioannis Lagos, l'ancien porte-parole du parti Ilias Kassidiaris, et le député Christos Pappas, bras droit de Michaloliakos, encourent jusqu'à quinze ans de prison.

Tous les sept, reconnus coupables d'avoir dirigé une organisation criminelle, avaient demandé des circonstances atténuantes, ce que la cour pénale d'Athènes a rejeté lundi matin, selon une source judiciaire. Mais l'annonce de leurs peines a été retardée, l'un des principaux accusés ayant réclamé le remplacement des trois juges de la cour pénale, d'après la même source.

L'eurodéputé indépendant Ioannis Lagos, ancien membre d'Aube dorée, est rentré dans le palais de justice d'Athènes lundi matin et a demandé que la cour soit récusée, jugeant le verdict "partial".

"La cour prononcera les peines dans quelques heures", a cependant annoncé à la presse le porte-parole du gouvernement Stelios Petsas. Devant la cour pénale d'Athènes, quelques centaines de manifestants anti-fascistes s'étaient rassemblés lundi matin, espérant le prononcé de lourdes peines de prison. "Pas de circonstances atténuantes pour les criminels nazis", pouvait-on lire sur des banderoles brandies par les manifestants, a constaté un vidéaste de l'AFP.

Après cinq ans et demi d'audiences, la cour a unanimement qualifié mercredi le parti paramilitaire d'"organisation criminelle" dans un verdict qualifié d'"historique" par la présidente de la République et toute une frange de la classe politique grecque. Elle a établi la culpabilité d'Aube dorée dans plusieurs crimes, en particulier le meurtre en 2013 du rappeur antifasciste Pavlos Fyssas, celui du Pakistanais Sahzat Luckman, en 2013, ainsi que l'agression de pêcheurs égyptiens en 2012 et de syndicalistes communistes en 2013.

Plus d'une cinquantaine de personnes, dont 18 anciens députés d'Aube dorée, ont été reconnues coupables de crimes divers: direction d'une organisation criminelle, meurtre, agression, possession illégale d'armes.... Une dizaine des 68 accusés ont été acquittés.

- "Vous ne me faites pas peur" -

L'annonce du verdict avait été acclamée par une foule de 20.000 manifestants rassemblés devant le palais de justice. De brèves émeutes avaient opposé des protestataires et la police.

Celle-ci avait interdit une manifestation lundi de sympathisants d'Aube dorée, à l'appel de Ioannis Lagos qui estime avoir été condamné par "une équipe tétanisée de petites gens répondant aux ordres et piétinant le droit dans tous les sens". "Vous ne me faites pas peur", avait-il encore tweeté la semaine dernière.

Lundi, son avocat Constantinos Plevris, sympathisant nazi et auteur d'un livre antisémite, a déclaré à la cour avoir l'impression d'être devant "un tribunal de la Révolution française", estimant que le verdict a été influencé par la taille de la manifestation antifasciste alors devant le tribunal. "Ce n'est pas un procès de l'idéologie", a encore déclaré l'avocat, fustigeant un verdict "partial".

Le chef et fondateur du parti paramilitaire Nikos Michaloliakos a également rejeté sa condamnation la semaine dernière sur Twitter. "Nous avons été condamnés sur nos idées", a-t-il tweeté. "Quand les immigrés illégaux sont majoritaires en Grèce, quand (le gouvernement) cède à tout devant la Turquie, quand des millions de Grecs sont au chômage dans la rue, ils se souviendront d'Aube dorée". Son compte a été ensuite suspendu par Twitter.

Le meurtre du militant de gauche et rappeur Pavlos Fyssas, dans la nuit du 18 septembre 2013, avait choqué la Grèce en pleine crise financière et contraint les autorités à poursuivre le parti néonazi, responsable de meurtres et violences contre des migrants et des militants de gauche depuis les années 90 mais qui avait bénéficié jusque là d'une quasi-impunité.

Dans cette affaire, Yorgos Roupakias, membre d'Aube dorée, a été reconnu coupable d'"homicide volontaire" par la cour pénale d'Athènes et risque la prison à perpétuité. Ce procès fleuve a entraîné progressivement le déclin d'Aube dorée, troisième force politique en 2015, qui n'a obtenu aucun député aux dernières législatives de juillet 2019.

AFP

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