Pandémie

Virus : en Amazonie brésilienne, des hôpitaux débordés

  • Publié le 22 janvier 2021 à 11:43
  • Actualisé le 25 janvier 2021 à 16:30

"Ca a été très vite, tout d'un coup tout était plein", raconte un soignant de l'hôpital d'Iranduba, une ville moyenne de l'Amazonie brésilienne qui ne compte pas de service de soins intensifs et dont la survie des patients dépend de l'arrivée des bouteilles d'oxygène.

L'Etat d'Amazonas, le plus grand du Brésil, connaît une explosion de nouveaux cas de coronavirus, qui pourrait être liée à un variant plus contagieux détecté dans la région. Comme celui d'Iranduba, ville de 50.000 habitants située à 40km de Manaus, la capitale de l'Amazonas, de nombreux hôpitaux de cet Etat sont débordés par cette nouvelle vague de contaminations.

A l'hôpital Hilda Freire, la quasi-totalité des 30 lits sont occupés et 15 décès dus au Covid-19 ont été enregistrés entre lundi et mercredi, soit plus qu'au cours des quatre derniers mois. La réserve d'oxygène qui durait autrefois deux semaines est épuisée en une journée à peine. "Notre structure ne peut pas supporter cela", se lamente auprès de l'AFP le soignant, dans ses vêtements de protection. Il souhaite garder l'anonymat pour raconter les décès par asphyxie dont il préfère ne pas faire le compte. "Nous n'avions aucun moyen de les aider, ça nous a beaucoup attristés", se désole-t-il. "Dès que la réserve d'oxygène est vide, on s'inquiète de savoir comment on va en trouver pour le lendemain. On est en tension constante", se plaint un autre soignant.

L'unique accès à Iranduba est une route dont certains tronçons sont en travaux et qui se transforment en bourbier lors des pluies diluviennes amazoniennes. C'est cette voie que les patients les plus gravement atteints doivent emprunter pour rallier la capitale Manaus, la seule des 63 villes de l'Etat à disposer d'une unité de soins intensifs et d'où partent les bouteilles rechargées en oxygène.

L'urgence sanitaire a multiplié les défis logistiques dans cette région de jungle humide traversée par les affluents du fleuve Amazone. Les familles des patients hospitalisés en sont réduites à chercher des solutions par elles-mêmes.

Une bénévole d'ONG laisse une bouteille d'oxygène pour un patient de 86 ans, hospitalisé depuis deux semaines : "Il a passé trois ou quatre heures sans oxygène, avec une ventilation manuelle, sa famille désespérée nous a demandé de l'aide", raconte-t-elle à l'AFP. Habituellement, l'ONG aide à approvisionner les communautés indigènes en médicaments et vêtements.

- "Je ne sais pas combien sont morts" -

À environ 85 km à l'ouest d'Iranduba, le long d'une route qui traverse la forêt, se trouve la ville de Manacapuru, qui compte 223 décès du Covid-19 pour 100.000 habitants, le taux le plus élevé de l'Amazonas. Dans le service décrépit des urgences de l'hôpital Lazaro Reis, le seul de la ville, des patients entrent et sortent sans arrêt et le personnel court dans tous les sens.

Dans un couloir, un patient sur un brancard est directement relié à une bouteille d'oxygène. "Je ne sais pas combien sont morts, mais ils étaient nombreux", dit un médecin pressé qui ne donne pas son nom. Le hurlement d'une sirène se fait soudain entendre. "Une autre ambulance !" s'exclame-t-on. "Non, c'est l'oxygène !", lance le gardien du parking qui règlemente l'accès aux urgences.

Il ouvre le passage au convoi composé de quatre fourgons sous escorte, chargés des tant attendues bouteilles vertes. Une demi-douzaine d'hommes surgissent pour décharger les camionnettes et les remplir de bouteilles vides. "Ca fait plaisir de les voir arriver", confie le gardien. "On ne sait jamais quand ils vont revenir", dit-il.

Selon les autorités, un retard de livraison a entraîné mardi le décès par asphyxie de sept personnes à Caori, un village en amont de Manacapuru, sur le Rio Solimoes. Un employé de l'hôpital regarde vers le ciel et, les mains jointes dans un geste de prière, implore : "pourvu que l'oxygène ne vienne pas à manquer à nouveau".

AFP

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