Politique

Géorgie: appels à manifester après l'arrestation d'un chef de l'opposition

  • Publié le 23 février 2021 à 15:06
  • Actualisé le 23 février 2021 à 15:34

L'opposition a appelé mardi à manifester en Géorgie après l'arrestation musclée d'une figure politique de premier plan, une mesure qui risque d'aggraver la crise politique en cours dans ce pays du Caucase depuis les législatives d'octobre.

Nika Melia, chef du principal parti d'opposition géorgien, le Mouvement national uni (MNU), a été extirpé mardi matin des locaux de sa formation politique, à Tbilissi, pour être placé en détention provisoire.

Des centaines de policiers anti-émeute ont alors utilisé des gaz lacrymogènes contre ses partisans et des dirigeants de tous les partis d'opposition, qui campaient devant le bâtiment depuis près d'une semaine.
Des dizaines de soutiens de l'opposition ont également été interpellés lors de cette opération dénoncée immédiatement par les alliés américain et britannique de la Géorgie.

- "Usage proportionné de la force" -

Le ministère géorgien de l'Intérieur a rétorqué que la police avait fait "un usage de la force proportionné et utilisé des moyens spéciaux" lors de cette opération. Le chef du parti Lelo, Mamouka Khazaradzé, opposé au gouvernement, a de son côté appelé à "un combat pacifique et inlassable pour défendre la démocratie géorgienne." "La libération des prisonniers politiques et des élections parlementaires anticipées représentent la seule issue possible à la crise", a-t-il affirmé, devant la presse.

Au nom des partis d'opposition, il a apppelé à manifester devant le siège du gouvernement. L'opération policière intervient après la démission jeudi du Premier ministre, Giorgi Gakharia, qui a cité un désaccord au sein du parti au pouvoir sur l'application de la décision judiciaire visant à placer M. Melia en détention. Ce dernier est accusé d'avoir organisé des "violences de masse" lors de manifestations d'envergure en 2019. Il encourt neuf ans de prison et rejette ces accusations, qu'il estime de nature politique.

L'ambassade américaine s'est déclarée dans un communiqué "profondément préoccupée" par l'arrestation de Nika Melia. "La force et l'agressivité ne sont pas la solution pour résoudre les différends politiques en Géorgie. Aujourd'hui, le pays a reculé sur le chemin qui doit l'amener à devenir une démocratie plus forte dans la famille des nations euro-atlantiques", a ajouté l'ambassade. Sur Twitter, l'ambassadeur britannique Mark Clayton a dit être "choqué par les scènes au siège du MNU ce matin".

- "Système démocratique brisé" -

L'arrestation de M. Melia, 41 ans, pourrait encore fragiliser la démocratie en Géorgie, confrontée à une crise politique latente depuis les élections législatives d'octobre. Les partis d'opposition ont affirmé que ce scrutin avait été truqué après que le Rêve géorgien, la formation au pouvoir, a revendiqué une courte victoire.

Lundi, le Parlement a confirmé la nomination au poste de Premier ministre du ministre de la Défense, Irakli Garibachvili. Ce dernier a alors immédiatement indiqué que le gouvernement allait arrêter M. Melia, affirmant qu'il "ne réussirait pas à échapper à la justice". Le nouveau Premier ministre est considéré comme un fidèle de Bidzina Ivanichvili, le fondateur du parti Rêve géorgien et l'homme le plus riche du pays, suspecté de contrôler le pouvoir en sous-main.

Pour l'expert Matthew Bryza, du cercle de réflexion américain Atlantic Council, la Géorgie est arrivée à un point où "les partis d'opposition disent ne plus pouvoir siéger au Parlement car le système démocratique géorgien est brisé"."Sans une médiation plus grande de l'Occident, la situation pourrait devenir très dangereuse", ajoute cet ancien diplomate.

La semaine dernière, les Etats-Unis et l'Union européenne avaient exprimé leur inquiétude face à la décision d'arrêter Nika Melia, appelant le gouvernement géorgien à résoudre la crise de manière pacifique. Au pouvoir depuis 2012, le parti Rêve géorgien a vu sa popularité décliner sur fond de stagnation économique et d'accusations d'atteinte aux principes démocratiques dans cette ex-république soviétique.
 

AFP

guest
0 Commentaires