Exode

Birmanie : plus de 12.000 déplacés après des raids aériens de l'armée, selon une faction rebelle

  • Publié le 3 avril 2021 à 10:46
  • Actualisé le 3 avril 2021 à 11:39

Plus de 12.000 déplacés ont fui des raids aériens menés par l'armée birmane, d'après une des principales factions rebelles qui appelle la multitude de minorités ethniques du pays à s'unir contre la répression meurtrière du régime.

"Plus de 12.000 civils ont fui leur village ce qui cause une crise humanitaire majeure", a indiqué l'Union nationale Karen (KNU). Ripostant au bain de sang des forces de sécurité contre les opposants au coup d?État du 1er février, la KNU s'était emparée la semaine dernière d'une base militaire dans l?État Karen dans le sud-est du pays, tuant dix soldats.

L'armée avait riposté par des raids aériens ciblant des places-fortes de la faction, une première depuis une vingtaine d'années dans cette région. "Beaucoup de civils sont morts, dont des mineurs et des étudiants. Des écoles, des maisons et des villages ont été détruits", a relevé la KNU.

"Nous exhortons toutes les minorités ethniques du pays (qui en compte plus de 130, ndlr) à engager des actions fortes et à prendre des sanctions" contre les responsables.

- Guerre civile? -

Depuis l'indépendance de la Birmanie en 1948, de nombreuses factions ethniques armées sont en conflit avec le gouvernement central pour obtenir plus d'autonomie, l'accès aux nombreuses richesses naturelles ou une part du lucratif trafic de drogue.

A partir de 2015, l'armée avait conclu un accord national de cessez-le-feu (ANC) avec dix d'entre elles, dont la puissante Union nationale Karen. "Nous espérons que la majorité des membres de la KNU respectera le cessez-le-feu", a déclaré samedi à l'AFP le porte-parole de la junte, Zaw Min Tun, assurant que les raids aériens n'avaient duré qu'une journée.

Les 10 factions rebelles signataires de l'ANC tiennent une réunion ce week-end. Peu après le coup d'Etat, elles avaient indiqué continuer à appliquer le cessez-le-feu, malgré le passage en force des généraux.

Mais, depuis, "des centaines de civils, des enfants, des adolescents et des femmes, ont été tués" par les forces de sécurité, écrivent-elles samedi dans un communiqué. "Nous allons réévaluer" notre position au cours de la réunion.

D'autres groupes armés ont déjà apporté leur soutien à la mobilisation démocratique et menacé de reprendre les armes contre la junte. Et l'émissaire de l'ONU pour la Birmanie, Christine Schraner Burgener, a mis en garde cette semaine contre un risque "sans précédent" de "guerre civile".

- Plus de 550 morts -

La junte poursuit sa répression meurtrière. Plus de 550 civils sont tombés sous les balles des forces de sécurité ces deux derniers mois, d'après l'Association d'assistance aux prisonniers politiques (AAPP).

Le bilan pourrait être beaucoup plus lourd: quelque 2.700 personnes ont été arrêtées. Détenues au secret, sans accès à leur proche ou à un avocat, beaucoup sont portées disparues.

La junte a aussi bloqué l'accès à internet pour une grande majorité de la population, coupant les données mobiles et les connexions sans fil.

Fréquences radio, SMS, applications qui fonctionnent sans connexion: le mouvement pro-démocratie tente de trouver d'autres alternatives pour s'organiser.

A Dawei, dans le sud du pays, des jeunes ont défilé samedi, brandissant des drapeaux rouges aux couleurs de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) d'Aung San Suu Kyi.

D'autres rassemblements ont eu lieu à travers le pays et au moins trois personnes ont été tuées et plusieurs blessés, ont rapporté des témoins à l'AFP. "La junte utilise maintenant des grenades (...) des mitrailleuses et d'autres armes de guerre contre le peuple birman. Cette folie doit cesser", a tweeté le rapporteur spécial de l'ONU Tom Andrews, exhortant à la mise en place d'un embargo sur les armes.

Mais le Conseil de sécurité de l'ONU reste divisé. La Chine et la Russie sont catégoriquement opposées à l'idée de sanctions des Nations Unies, contrairement aux Etats-Unis et au Royaume-Uni qui en ont déjà imposé de leurs côtés.

Les généraux resserrent aussi leur étau judiciaire contre Aung San Suu Kyi, 75 ans, accusée de corruption et d'avoir violé une loi sur les secrets d'Etat datant de l'époque coloniale.

Si elle est reconnue coupable, l'ex-dirigeante, détenue au secret mais "en bonne santé" selon ses avocats, risque d'être bannie de la vie politique et encourt de longues années de prison.

AFP

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