Justice

Féminicide de Julie Douib: la perpétuité requise contre son ex-compagnon

  • Publié le 16 juin 2021 à 14:16
  • Actualisé le 16 juin 2021 à 14:39

"La mort sociale": l'avocate générale a requis mercredi la "réclusion criminelle à perpétuité" contre Bruno Garcia-Cruciani, 44 ans, jugé aux assises de Bastia pour l'assassinat de son ex-compagne et mère de ses deux fils, Julie Douib, en 2019 à l'Ile-Rousse.

"Je vous demande de prononcer à son égard la réclusion criminelle à perpétuité", "une façon de requérir la mort sociale", a déclaré aux jurés Charlotte Beluet, l'avocate générale. Elle a requis également la "déchéance de l'autorité parentale" et, à la sortie de prison, un suivi judiciaire avec injonction de soins pendant 15 ans ainsi que l'interdiction de la détention d'une arme pendant 15 ans.

Pointant sa dangerosité et les menaces qu'il a proférées, elle a rappelé que de "nouvelles cibles existent" en la personne du père de Julie Douib et du professeur de sport avec qui elle était en relation au moment de sa mort à 34 ans, le 3 mars 2019. Elle a également rappelé l'analyse de l'expert-psychiatre qui a indiqué que la "paranoïa" de l'accusé, qui le conduit à "inverser le champ de la culpabilité", allait "s'aggraver dans le temps".

Reconnaissant qu'il y avait "un individu cabossé dans le box", la magistrate a appelé à "impérativement protéger" les enfants du couple, en "retirant la main qu'il a sur eux": "imaginez leur peine à eux, +papa, il a tué maman+", a-t-elle rappelé, s'indignant qu'il ait "transformé un domicile qui devrait être un refuge en véritable pénombre".

L'avocate générale a également demandé aux jurés que Julie "ne soit pas une statistique", rappelant que ce féminicide était le 30e sur 149 en 2019 en France. Electrochoc social, ce crime avait suscité une vague d'indignation dans le pays, entraînant l'organisation par le gouvernement d'un sommet sur les violences faites aux femmes.

- "Failles" -

"Bruno Garcia a tué délibérément" Julie Douib après l'avoir "séquestrée intellectuellement", a ajouté Charlotte Beluet, reconnaissant que "dans ses silences, Julie Douib a crié des tas de choses et nous n'avons pas su l'écouter". Il faut "reconnaitre toutes ces failles pour permettre d'avancer sur ces sujets-là", a-t-elle appelé de ses voeux, estimant que "le danger n'a pas été correctement évalué" et regrettant l'absence "d'enquête d'environnement, une enquête de base que l'on fait dans tout dossier de violences conjugales".

Anticipant les arguments de la défense, elle a tenu à préciser qu'"on peut tout à fait préparer la mort de quelqu'un et se rendre ensuite", ajoutant qu'avant de se rendre à la gendarmerie, Bruno Garcia-Cruciani est "d'abord rentré chez lui" pour "donner ses ordres à sa garde rapprochée". Et quand, depuis sa prison, il dit après la mort de la jeune femme, sur une écoute téléphonique, qu'il n'aura "pas une larme" pour son ex-conjointe, c'est "une façon de cracher sur sa tombe".

Pour Me Camille Nadot, avocat de la défense de M. Garcia-Cruciani, cette perpétuité requise "n'est pas juste" et ce "dossier n'a rien de particulier, malheureusement, ce n'est que la banalité du mal". Rappelant "qu'une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son compagnon ou ex-compagnon", il a indiqué que "tous les jours, ce type de dossier est jugé sans journaliste", dénonçant dans ce cas précis une "médiatisation à outrance".

"Ici on juge les hommes pour ce qu'ils ont fait", a insisté l'avocat, appelant à se méfier des "terribles" apparences et estimant qu'"on est obligé de relativiser": "Bruno Garcia n'est pas un animal, pas un monstre, c'est un être humain", mais "il ne le montre pas". Le verdict est attendu dans la journée de mercredi. L'accusé encourt la réclusion à perpétuité.

AFP

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