Justice

Les cyberharceleurs de Mila condamnés à des peines de 4 à 6 mois de prison

  • Publié le 7 juillet 2021 à 14:41
  • Actualisé le 7 juillet 2021 à 15:21

"On a gagné et on gagnera encore"... Mila, 18 ans, s'est félicitée de la condamnation mercredi à des peines de quatre à six mois de prison avec sursis de onze jeunes gens jugés pour avoir participé à son cyberharcèlement après sa vidéo polémique sur l'islam.

Au terme d'un procès érigé en symbole des "lynchages 2.0" devenus monnaie courante sur les réseaux sociaux, le tribunal correctionnel de Paris a condamné dix personnes pour "harcèlement en ligne" et la onzième, une jeune femme de 18 ans, pour "menaces de mort". Un douzième prévenu a bénéficié d'un vice de procédure et le dernier a été relaxé faute de preuves.

Tous, des jeunes pour la plupart sans antécédent judiciaire âgés de 18 à 29 ans étaient jugés pour avoir diffusé quelques-uns des milliers de messages de haine et de menaces contre Mila.

L'adolescente a été la cible d'un "raz-de-marée de haine" après avoir répondu en janvier 2020 à des injures sur les réseaux sociaux sur son orientation sexuelle par le biais d'une vidéo véhémente sur l'islam.

Alors âgée de 16 ans et demi, elle avait été contrainte de quitter son lycée et de vivre sous protection policière. Elle s'était attirée une nouvelle salve de menaces après la publication d'une seconde vidéo polémique, le 14 novembre dernier, dans laquelle elle lançait vertement à ses critiques: "et dernière chose, surveillez votre pote Allah, s'il vous plaît. Parce que mes doigts dans son trou du cul, j'les ai toujours pas sortis".

Mila a reçu, selon son avocat Richard Malka, quelque "100.000 messages" haineux. "Ce que je veux c'est que, tous ensemble, on n'arrête jamais de baisser les bras, qu'on continue de se battre", a commenté leur victime en sortant du tribunal accompagnée de ses parents, de son avocat et des agents chargés de sa protection.

- "Culpabiliser les victimes" -

"Ce que je veux, c'est que les personnes qui seraient considérées comme des pestiférés, à qui on interdirait les réseaux sociaux, ce soit ceux qui harcèlent, qui menacent de mort, qui incitent au suicide. Je ne veux plus jamais qu'on fasse culpabiliser les victimes", a insisté la jeune femme, cheveux courts teints en vert clair ramenés en chignon.

Plusieurs prévenus ont été condamnés en outre à verser à Mila la somme de 1.500 euros en raison des souffrances qu'elle a endurées et 1.000 euros chacun pour couvrir ses frais d'avocats.

Leur condamnation sera inscrite dans leur casier judiciaire, sauf pour un des condamnés qui a exprimé ses regrets. "Nous vous considérons responsables des dommages causés à Mila", a souligné le président de la 10e chambre correctionnelle, Michaël Humbert, en rendant son jugement. "Le réseau social, c'est la rue", a-t-il rappelé à l'adresse des condamnés, "ce que vous ne faites pas dans la rue, ne le faites pas sur les réseaux sociaux".

La vague de messages haineux qui a touché Mila était "une entreprise de harcèlement, qui a eu des conséquences physiques et psychiques" sur la jeune fille, a souligné le jugement du tribunal.

A l'audience, la plupart des prévenus ont reconnu la paternité de quelques-uns des messages adressé à Mila. "Qu'elle crève", "tu mérites de te faire égorger sale pute", "que quelqu'un lui broie le crâne par pitié", lui avaient-ils écrit.

Ce procès était l'un des tous premiers sur la base de l'infraction de cyberharcèlement créée par une loi de 2018. Elle peut être constituée dès lors que plusieurs personnes s'en prenant à une même victime savent que leurs propos ou comportements caractérisent une répétition, sans que chacune de ces personnes ait agi de façon répétée ou concertée.

Dans un communiqué, la ministre déléguée à la Citoyenneté Marlène Schiappa a rappelé avoir porté la loi et réitéré son soutien à Mila. "Le pays entier doit condamner les agresseurs et cesser de blâmer les victimes", a-t-elle insisté.

Depuis 2018, un total de 7.374 infractions pour cyberharcèlement ont été enregistrées par les forces de l'ordre, selon la ministre.

 AFP

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