Justice

Procès Troadec: place à la défense... et au verdict

  • Publié le 7 juillet 2021 à 06:26
  • Actualisé le 7 juillet 2021 à 06:31

Hubert Caouissin passera-t-il le reste de ses jours en prison? L'homme, qui a tué la famille Troadec à coups de pied de biche et démembré leurs corps, saura mercredi si la cour d'assises suit le raisonnement du ministère public et le condamne à perpétuité.

"Un homme ordinaire peut passer outre son humanité et dépecer sa famille par alliance pour dissimuler ses crimes. Cette affaire a quelque chose de glaçant, de sordide, d'extraordinaire", a résumé mardi dans un réquisitoire à deux voix l'avocate générale Charlotte Gazzera, devant les assises de Loire-Atlantique.

Au terme de deux semaines de débats, l'accusé, ancien chaudronnier ouvrier à l'arsenal de Brest, va enfin être fixé sur son sort. Ce quinquagénaire au crâne dégarni est jugé pour le meurtre de Brigitte et Pascal Troadec (49 ans) et de leurs enfants Charlotte (18 ans) et Sébastien (21 ans) à coups de pied de biche, à leur domicile d'Orvault, près de Nantes, dans la nuit du 16 au 17 février 2017.

Dans sa ferme du Finistère, il a ensuite dépecé minutieusement les corps au couteau de cuisine pendant trois jours, jetant les muscles et les viscères dans des ronciers, dans l'espoir qu'ils soient mangés par des animaux sauvages, et incinérant les os, la peau et le gras dans sa chaudière. "Une stratégie de disparition des corps" qui a "privé les proches des victimes des rites ancestraux du deuil", a pointé Mme Gazzera, en relevant que 379 morceaux de chair et 2.914 morceaux d'os avaient été retrouvés à l'issue du drame.

Cette stratégie "assez inédite" vise, selon elle, à entraver le travail de la police scientifique afin "qu'il puisse nous servir l'histoire qui l'arrange". La magistrate a pointé les incohérences, les "élucubrations" et les "calculs" dans le récit de l'accusé, qui raconte s'être rendu chez sa belle-famille pour obtenir des "informations" sur le vol d'un hypothétique trésor de lingots d'or.

Assailli dès son entrée dans la maison, M. Caouissin aurait tué pour se défendre. "Est-ce qu'à un contre quatre, on s'en sort indemne avec quatre morts?", a demandé la magistrate, en relevant que M. Caouissin n'avait "aucune égratignure" à l'issue de l'affrontement.

- Atténuation de peine -

Longuement interrogé sur le déroulement des crimes au cours des deux semaines d'audience, M. Caouissin a toujours répondu avec précision aux questions de la présidente tout en affirmant avoir "plein de trous noirs" depuis cette nuit où il était venu espionner à la porte des Troadec avec un stéthoscope. Ses avocats, qui doivent plaider mercredi matin, devraient insister sur le "délire chronique de type paranoïaque" diagnostiqué par les experts psychiatres, qui ont décrit un accusé obsédé par un sentiment de spoliation et la "certitude d'un danger de mort imminent", l'ayant conduit à commettre les crimes.

Si la cour reconnaissait que le discernement de M. Caouissin était altéré pendant la commission des crimes, elle pourrait alors lui accorder une atténuation de peine, qui serait abaissée à 30 ans de réclusion.

Insistant sur la "dangerosité" de M. Caouissin, l'avocate générale a au contraire demandé aux jurés de ne "pas tenir compte" de cette altération du discernement et a requis la réclusion à perpétuité assortie d'une période de sûreté de 22 ans.

Sans être surpris par ces réquisitions, Me Patrick Larvor s'est cependant dit "frappé" d'entendre l'avocate générale "parler de dangerosité". "Je ne sais pas si elle a écouté les experts psychiatres et notamment le Dr Coutanceau qui dit qu'il n'était pas inquiet pour Hubert Caouissin", a-t-il souligné.

La peine maximale, trois ans de prison ferme, a également été requise à l'encontre de l'ancienne compagne de M. Caouissin, Lydie Troadec, 52 ans, jugée pour modification de scène de crimes et recel de cadavres. "Cela mériterait une peine bien supérieure", a estimé l'avocat général Stéphane Cantero, qui a moqué le rôle de "nunuche soumise (...) à maman et à son compagnon" joué, selon lui, par l'accusée.

AFP

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