4ème vague

Covid : au CHRU de Strasbourg, des patients plus jeunes, non vaccinés

  • Publié le 29 juillet 2021 à 11:36
  • Actualisé le 29 juillet 2021 à 13:58

Au CHRU de Strasbourg, les professionnels de santé observent, "inquiets", la progression de la quatrième vague de contamination au Covid-19, quand les bras manquent en cette période estivale.

En Chambre D131, Olivier Eberhardt multiplie les questions auprès d'un médecin. Devant lui, son père, âgé de 76 ans, est allongé sur un lit de réanimation, relié par différents câbles et tuyaux à des machines qui bipent à intervalles réguliers. Après une demi-heure de visite, il quitte la chambre, éprouvé. "Il y a eu des cas de covid dans la famille, mais en réanimation, c'est la première fois", témoigne ce conducteur de travaux de 48 ans, sous sa blouse et son masque FFP2.

"Il aurait dû se faire vacciner, il ne l'a pas fait en suivant ma mère qui ne voulait pas, et maintenant, on en récolte les fruits", constate-t-il, amer.Début juillet, pendant douze jours, aucun nouveau malade du Covid-19 n'avait été admis à l'hôpital, pour la première fois depuis 18 mois. Mais depuis, les "patients covid" sont revenus, forçant les soignants, une fois de plus, à s'organiser pour libérer des lits.

"En une dizaine de jours, on est passé de 2 à 18 patients", explique Nicolas Lefebvre, chef du service d'infectiologie. "J'en ai pris trois dans mon service, les autres sont en pneumologie et en médecine interne. Et puis il y en a quatre en réanimation".

- "Jamais arrivé" -

Au CHRU, à une exception près, aucun des patients de la quatrième vague n'avait été vacciné. Et ils présentent, comparé aux vagues précédentes, une moyenne d'âge moins élevée. "C'est cohérent avec les chiffres de l'épidémie, la tranche 20/30 ans est celle qui présente le plus fort taux d'incidence", souligne le professeur Lefebvre. "Pour citer deux exemples, ces derniers jours nous avons hospitalisé deux personnes, âgées de 30 et 40 ans".

"C'est choquant de voir des gens proches notre âge descendre en réanimation, c'était quasiment jamais arrivé", complète Florie-Anne Hofmans, 23 ans, infirmière en infectiologie. "Le grand public imagine qu'une fois sorti de réanimation, le patient est sauvé, mais c'est beaucoup de rééducation. On a des malades qui reviennent, des personnes qui étaient complètement autonomes et qui ne peuvent plus se laver seuls, ni même tenir leur téléphone".

Face à la virulence du variant delta, et à la perte de vigilance quant aux gestes barrières, les médecins alertent sur le risque de contamination intra-familiale. "La plupart des contaminations qu'on a, c'est par des jeunes, qui ont voyagé. On a eu plusieurs cas de retour de Barcelone. Ils se contaminent entre eux ou contaminent leurs familles et leurs aînés", détaille Pascal Bilbault, le chef du pôle urgence et réanimation.

- "Hôpital en tension" -

Malgré l'expérience accumulée depuis le début de la crise sanitaire, cette vague inquiète les soignants, notamment parce qu'elle arrive "à un très mauvais moment". Depuis le 6 juillet, l'établissement est classé "hôpital en tension", confronté, comme chaque été, à un important déséquilibre : aux urgences, le flux de patients augmente, en raison notamment de la fermeture estivale de certains cabinets de médecine de ville, mais les services ne disposent pas de renforts, bien au contraire.

"L'été, c'est le moment où nous partons en vacances, les infirmières, les médecins ont besoin de souffler, de se reposer. Et on se retrouve à devoir faire face à une arrivée de malades avec des effectifs contraints", regrette Nicolas Lefebvre. Son service d'infectiologie affiche ainsi avec une capacité d'accueil réduite de moitié.

Trois étages plus bas, le professeur Ferhat Meziani, chef du service de réanimation, n’hésite pas à évoquer "le découragement et la démotivation" qui touchent certains professionnels. "Je n'arrive plus à dire aux équipes +ça va bien se passer+", confie-t-il. "Ce n'est pas tenable ce qu'on est en train de s'imposer". Symptôme de cette situation dégradée, les arrêts maladie au sein du pôle sont aussi nombreux en juillet que sur l'ensemble du premier semestre.

Alors, comme l'ensemble de ses collègues, il espère que la vague sera "la moins haute possible". "La solution, c'est de continuer à respecter les gestes barrières, et d'aller se faire vacciner", conclut-il.

AFP

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