Spectacle de désolation

En Grèce, "corps à corps" pour arrêter la course folle de l'incendie d'Eubée

  • Publié le 10 août 2021 à 14:07
  • Actualisé le 10 août 2021 à 14:13

Villages assiégés par le feu, pinèdes carbonisées et maisons réduites à l'état de carcasses: l'île grecque d'Eubée offrait un spectacle de désolation mardi, alors que les soldats du feu tentaient d'arrêter la course folle du plus destructeur des incendies de Grèce.

A ce stade, plus de 3.000 personnes ont été évacuées par la mer de l'île grecque, qui s'est embrasée sur sa partie nord il y a huit jours sous l'effet de températures caniculaires, a déclaré à l'AFP un responsable des garde-côtes grecs.

Les pompiers, aidés de nombreux volontaires, bataillaient toujours mardi pour empêcher le feu d'atteindre la ville d'Istiaia qui abrite encore des milliers d'habitants. "Les citoyens et les pompiers sont engagés dans une bataille au corps à corps, se battant avec tout leur coeur et toute leur âme", a déclaré sur sa page Facebook le maire d'Istiaia, Yiannis Kontzias. "Nous attendons un soutien aérien, mais nous verrons si la fumée permet de voler", a-il ajouté sur la télévision publique ERT.

La Grèce et la Turquie traversent depuis deux semaines une vague d'incendies violents, favorisés par une canicule exceptionnelle, qui ont fait huit morts sur les côtes turques et deux morts aux portes d'Athènes, ainsi que des dizaines de blessés hospitalisés.

Si la Turquie semblait désormais sortie d'affaire, avec plus que de petits feux dans la région de Mugla, la Grèce était confrontée à "une catastrophe naturelle aux proportions sans précédent", selon le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis.

Plus de 93.700 hectares ont été ravagés depuis le 29 juillet, au début de cette vague d'incendies, selon le Système européen d'information sur les feux de forêts (EFFIS). Moins de 2.300 hectares avaient été brûlés en moyenne sur la même période entre 2008 et 2020.

- "Si le feu passe ici, c'est fini" -

En T-shirts et souvent sans masque ni casque, les volontaires, aidés de pompiers, ont lutté sur plusieurs fronts toute la nuit pour contenir les flammes qui embrasent depuis le 3 août cette immense île montagneuse et arborée.

Sur la route menant au village de Kamatriades, une quinzaine d'habitants se sont battus à la nuit tombée contre la progression inexorable du feu malgré un faible vent, a constaté une équipe de l'AFP. "Si le feu passe ici, c’est fini", a lancé un jeune volontaire.

Mardi matin, le maire d'Istiaia se montrait "optimiste" sur le front de Kamatriades, estimant sur Facebook que le feu y était "sous contrôle". "Nous avons réussi à contrôler ce front car nous l'avons arrosé depuis la terre et depuis les airs" lundi, a ajouté l'édile, interrogé sur ERT depuis Kamatriades.

Mais sur l'autre front, une centaine de pompiers, dont des Serbes et des Slovaques venus renforcer leurs collègues grecs, avaient déployé mardi matin leurs tuyaux pour se battre contre l'avancée impitoyable des flammes, ont constaté des journalistes de l'AFP.

- Mitsotakis demande pardon -

A Avgaria, une autre localité proche d'Istiaia, l'incendie a franchi dans la nuit le coupe-feu. "La maison de ma tante a brûlé, celle de mon grand-père n'est pas loin", lâche Yannis, un jeune habitant d'Avgaria, venu prêter main forte aux pompiers. "Si on ne vient pas nous, qui va le faire?", demande-t-il.

Sur la route entre Agravia et Galatsona, une dizaine de camions sont alignés, tandis que des coupe-feux avaient été érigés pour protéger les villages de Kamaria et Kastaniotissa.

Les forces déployées dans la partie nord d'Eubée, embrasée d'est en ouest, ont été renforcées mardi. Ce sont désormais 870 pompiers qui opéraient, dont beaucoup de Chypre, Slovaquie, Pologne, Serbie, Ukraine et Roumanie, selon les services d'incendies grecs.

Dix-sept hélicoptères bombardiers d'eau étaient mobilisés, dont deux de Suisse et deux d'Egypte, ainsi que huit avions, dont trois Canadairs français, selon la même source.

Le maire d'Astiaia a estimé que "les hélicoptères avaient beaucoup aidé" lundi et que "si nous avions fait çà dès le début, nous aurions évité cette destruction". "Des erreurs ont été faites et nous devons en tirer les leçons. L'Etat grec ne devra jamais oublier ce qui s'est passé au nord d'Eubée", a-t-il ajouté sur ERT TV.

Le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis, critiqué par l'opposition et nombre d'habitants et d'autorités locales, s'est excusé à la Nation. "Je demande pardon pour de possibles erreurs" commises dans la réponse gouvernementale, a-t-il déclaré lundi soir dans une allocution télévisée. "Nous avons fait tout ce qui était humainement possible, mais dans plusieurs cas, ce n'était pas assez", a-t-il dit.

AFP

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