Covid-19

La prolongation controversée du pass sanitaire présentée en Conseil des ministres

  • Publié le 13 octobre 2021 à 06:25
  • Actualisé le 13 octobre 2021 à 06:51

"Blanc-seing" ou simple "boîte à outils" ? Le projet de loi prolongeant jusqu'au 31 juillet 2022 le recours possible au pass sanitaire est présenté mercredi en Conseil des ministres, sous le feu des oppositions qui contestent la décision d'enjamber l'élection présidentielle.

Le texte, que l'AFP a pu consulter, a cependant été légèrement amendé après son passage en Conseil d'Etat pour inclure la présentation par le gouvernement d'un "rapport" au Parlement, faisant un point d'étape sur les mesures prises et "précisant les raisons du maintien, le cas échéant, de certaines d'entre elles". Ce bilan doit intervenir au minimum trois mois après la publication de la loi, et "au plus tard le 28 février 2022", date de la fin de la session parlementaire.

En parallèle, le texte présenté mercredi durcit les sanctions en cas de fraude au pass sanitaire, jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende. Mais il ne règle pas l’épineux cas de l'articulation de ce pass avec le déploiement progressif de la troisième dose de vaccins, pour l'heure réservée aux personnes âgées ou vulnérables.

Bien que le reflux de l'épidémie de Covid se poursuive sur la majorité du territoire, l'exécutif entend éteindre tout procès en imprévoyance en cas de regain, en étendant la légalité du pass sanitaire, dont l'échéance était prévue au 15 novembre, jusqu'au milieu de l'été prochain.

Quant au régime juridique actuel, qui permet de limiter localement les déplacements des personnes ou de fermer certains établissements en cas de forte reprise épidémique, il est également prorogé du 15 novembre jusqu'au 31 juillet 2022.

Ce bonus de huit mois fait aussi grincer des dents à droite comme à gauche, car il évacue le débat de la campagne et des élections qui scanderont le premier semestre 2022. "Il n'est pas question de donner un blanc-seing jusqu'au 31 juillet 2022, il faut que ça soit sous le contrôle du Parlement", a ainsi tonné mardi sur franceinfo le président du Sénat Gérard Larcher. "Ça veut dire que, en février, nous devrons débattre à nouveau de la poursuite du processus de sortie de l'urgence", a-t-il ajouté, en dénonçant "une atteinte aux libertés individuelles et collectives".

- "Festival de démagogie" -

Reçus en visioconférence mardi par Jean Castex, lors d'un comité de liaison parlementaire, les députés Jean-Christophe Lagarde (UDI et Indépendants) et Sébastien Jumel (communiste) ont fait savoir leur opposition à un tel délai sans consultation du Parlement. Même tonalité chez les sénateurs qui ont signifié que "le débat" au Palais du Luxembourg "allait se jouer sur la place du contrôle du Parlement", selon un participant à la réunion.

Après avoir hésité à instaurer une clause de revoyure au Parlement au premier trimestre 2022, la majorité a fait le calcul que "quoi qu’on fasse les oppositions hurleront". "Et si on approche de l'élection elles gueuleront plus fort. Pour nous, ce sera un mauvais moment à passer mais ce n'est pas très grave", avance un proche du président.

Ce nouveau projet de loi est "une boîte à outils" dans laquelle le gouvernement pourra piocher en cas de besoin, a défendu de son côté Olivier Becht, patron du groupe Agir, une des composantes de la majorité présidentielle. Et le même prédit "un festival de démagogie" en cas de retour du Parlement "à trois semaines de la présidentielle".

"L'enjeu pour nous n'est pas de dire que nous allons prolonger indéfiniment des contraintes", avait de son côté plaidé fin septembre le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal.

L'exécutif, qui a écarté de rendre la vaccination obligatoire, a fait du pass sanitaire un pivot de sa stratégie anti-covid, provoquant depuis plus de trois mois des manifestations qui ont réuni samedi dernier environ 40.000 personnes.

Le pass est devenu obligatoire le 21 juillet dans les lieux accueillant plus de 50 personnes avant d'être instauré dans les hôpitaux (sauf urgences), les bars et restaurants, puis étendu au 30 août aux 1,8 million de salariés au contact du public et fin septembre au 12-17 ans.

La fin de la gratuité de certains tests dits "de confort" au 15 octobre constitue un nouvel étage de cette stratégie, en encourageant encore davantage la vaccination.

AFP

guest
0 Commentaires