Après trois jours d'émeutes

Iles Salomon: les habitants inquiets de la capitale nettoient les décombres

  • Publié le 28 novembre 2021 à 14:02
  • Actualisé le 28 novembre 2021 à 15:04

Inquiets, les habitants de Honiara, la capitale des îles Salomon, ont commencé dimanche à déblayer les décombres calcinés après trois jours d'émeutes meurtrières.

A l'angle d'une rue du quartier chinois, épicentre des incendies et pillages, des étudiants, armés de râteaux et de pelles s'attelaient à nettoyer une route, ont constaté des correspondants de l'AFP.

Les rues avoisinantes étaient jonchées de monticules de débris, stigmates des violences qui ont éclaté en raison notamment de graves difficultés économiques exacerbées par la pandémie de Covid-19 et de la colère à l'encontre du gouvernement de Manasseh Sogavare.

Un couvre-feu nocturne d'une durée indéterminée et la présence d'une force de maintien de la paix d'environ 150 soldats et policiers venus d'Australie et de Papouasie-Nouvelle-Guinée, venus seconder la police locale, semblent avoir calmé les troubles.

"La situation s'est apaisée et les habitants se déplacent normalement, mais on ne sait cependant toujours pas ce qui peut se encore se passer", reconnait Kennedy Waitara, responsable de la Croix-Rouge. Selon lui, beaucoup de magasins d'alimentation sont partie en fumée lors des émeutes.

- Hausse des prix -

"Il ne serait pas surprenant que nous connaissions des pénuries de nourriture et une hausse des prix", explique-t-il. "Le chômage va sûrement augmenter dans les prochaines semaines car des gens vont certainement perdre leur emploi". Ce responsable de la Croix Rouge dit avoir constaté une hausse des prix dans les magasins.

De nombreuses personnes étaient trop inquiètes dimanche pour assister à la messe dans cet archipel chrétien de 800.000 habitants, a affirmé Nason Ta'ake, un responsable de la jeunesse de l'église Wesley à Honiara. "Il n'y a que quelques fidèles qui assistent aux services religieux, car la plupart d'entre elles vivent encore dans la peur", selon M. Ta'ake.

A leur sortie de l'église, ils sont partis en quête de nourriture et de produits de première nécessité, mais très peu de commerces étaient ouverts, a-t-il expliqué.

Deux ans de fermeture des frontières en raison de la pandémie ont fini par asphyxier l'économie des Iles Salomon, déjà fragilisée, aggravant le chômage et la pauvreté.

- "Très instable" -

Selon les premières estimations de la banque centrale de l'archipel, les pertes économiques s'élèvent à près de 28 millions de dollars (24,7 millions d'euros) qui estime que 56 bâtiments ont été brûlés ou pillés dans la capitale.

Des médecins légistes tentent d'identifier les restes carbonisés de trois corps découverts dans une boutique du quartier chinois incendiée, a indiqué la police.
Le Premier ministre australien Scott Morrison a indiqué dimanche être régulièrement tenu informé du déploiement de la force de maintien de la paix, ajoutant qu'il s'attend au déploiement de forces par les Fidji.

"Bien que la situation demeure instable, à ce stade, il n'y a pas, à notre connaissance, de zones où il y a eu une perte de contrôle", a déclaré M. Morrison à la presse.

Le dirigeant australien a affirmé qu'il revient à l'archipel de résoudre la crise, "il ne nous appartient pas de nous immiscer dans leur démocratie", ajoutant que les forces australiennes ont pour seul objectif de rétablir le calme.

Beaucoup d'habitants des Iles Salomon accusent leur gouvernement d'être corrompu et d'être redevable à Pékin et à d'autres intérêts étrangers. Mercredi, des manifestants ont réclamé la démission du Premier ministre avant de prendre d'assaut le Parlement et de déferler dans les rues de la capitale.

- Relation avec Pékin -

Plus de 100 personnes ont été arrêtées en lien avec les émeutes, a annoncé samedi la police locale. Les violences s'intensifiant, le Premier ministre a appelé les pays voisins à envoyer des force pour rétablir le calme.

Dans une lettre à son homologue de Papouasie-Nouvelle-Guinée, James Marape, consultée par l'AFP, il a lui demandé l'envoi d'une force de maintien de la paix pour une "période de trois à quatre semaines".

Samedi, les dirigeants de l'opposition ont appelé à un vote de défiance contre le gouvernement de M. Sogavare. S'il n'est pas encore sûr qu'ils disposent d'un nombre suffisant de voix pour démettre le Premier ministre de ses fonctions, cette initiative pourrait se transformer en poudrière.

Ce dirigeant pro-Pékin a affirmé que des puissances étrangères, opposées à la décision prise en 2019 par son gouvernement de ne plus reconnaître diplomatiquement Taïwan mais la Chine, étaient à l'origine de ces troubles.

D'autres pointent du doigt les tensions entre les habitants de l'île la plus peuplée de Malaita et celle de Guadalcanal, où se situe la capitale administrative ainsi que l'important taux de chômage.

AFP

guest
0 Commentaires