Covid-19

Guadeloupe: des manifestants anti pass sanitaire s'installent pour la nuit au Conseil régional

  • Publié le 24 décembre 2021 à 09:42
  • Actualisé le 24 décembre 2021 à 09:45

Des manifestants ayant fait irruption jeudi en fin de matinée dans l'hémicycle du Conseil régional de la Guadeloupe, ont décidé d'y passer la nuit pour poursuivre ce qui a été qualifié par des élus d'acte d'une "violence inédite", qui illustre une contestation qui dure depuis plusieurs semaines dans l'archipel.

"C'est devenu la maison du peuple", a déclaré à la presse locale Gaby Clavier, syndicaliste de la branche santé de l'UGTG, après une réunion avec le président de la région Ary Chalus. "Le président s'est engagé à nous obtenir une réunion avec les parlementaires, mardi", a affirmé à l'AFP Jocelyn Zou, syndicaliste FO et pompier mobilisé contre l'obligation vaccinale.

Les manifestants, qui comptent rester "dormir dans l'hôtel de région", doivent décider vendredi de la suite à donner au mouvement. Ils demandent à l'Etat de se joindre à la table des négociations, interrompues depuis deux semaines, pour discuter des problématiques à l'origine de la crise sociale en Guadeloupe, avec en tout premier lieu l'obligation vaccinale.

Cette intrusion à l'issue d'une séance plénière des élus a été condamnée par l'ensemble de la classe politique de Guadeloupe. "Ces faits (...) relèvent d'une radicalisation qui utilise la terreur" et sont "une atteinte inacceptable à la démocratie", ont estimé les élus de la Commission permanente du département.

"Détruire le mobilier de la Région,(...) saccager les bureaux des agents, molester des journalistes, insulter et menacer des agents de la Région Guadeloupe est inexcusable!", avait dénoncé plus tôt l'exécutif régional, critiquant dans un communiqué des "pratiques d'intimidation et de violence indignes".

- Résistance au vaccin -

Selon la région, "plus d'une centaine de personnes" ont pénétré dans l'hémicycle en fin de matinée mais au total ce sont "plus de 400 personnes" qui ont envahi les locaux.

En Guadeloupe, où un premier cas de variant Omicron a été détecté samedi et où la quatrième vague de Covid-19 a fait plus de 800 morts, la résistance à la vaccination est forte.

L'archipel a été touché en novembre par un mouvement de contestation, parfois violent, né de l'opposition à l'obligation faite au personnel soignant et aux pompiers de se vacciner contre le Covid-19. Le conflit a tourné à la crise sociale.

Plusieurs représentants de la société civile (universitaires, philosophes, syndicalistes, etc) ont lancé une pétition il y a quelques jours contre des violences commises au CHU de Guadeloupe et ont dénoncé l'action de jeudi. "Il est des espaces communs qui méritent d'échapper à la fureur et aux violences. C'est le cas des hôpitaux et des enceintes du débat démocratique", ont-ils écrit dans un communiqué.

En s'introduisant au sein du Conseil régional, les manifestants --un collectif d'organisations, notamment syndicales et citoyennes, très revendicatif-- entendent faire pression sur les élus afin qu'ils demandent la participation de l'Etat aux négociations destinées à mettre un terme à cette crise. "Aucune revendication ne justifie d'entraver le bon déroulement d'une assemblée d'élus en pleine séance plénière", a tweeté le ministre des Outre-mer Sébastien Lecornu.


- "Manettes financières" -

"Nous voulons que les élus votent une motion pour faire venir l'Etat à la table des négociations" car il a "les manettes financières pour beaucoup de points de négociations", a expliqué Jean-Marie Nomertin, leader du syndicat CGTG, présent dans l'hémicycle. Les négociations ont tourné court il y a deux semaines après la signature d'un "accord de méthode" par les élus locaux et le collectif mais pas par l'Etat, absent du processus.

Le ministère des Outre-mer a annoncé il y a trois jours que les personnels de santé des Antilles réfractaires à l'obligation vaccinale seraient "suspendus" au 31 décembre et pourraient "s'orienter vers un nouveau métier" via une "cellule d'accompagnement et de reconversion professionnelle".

Des manifestations se sont déroulées au cours du weekend. L'accès au plus grand centre commercial de l'île a notamment été bloqué plusieurs heures samedi, et un incendie s'est ensuite déclaré dans l'hypermarché.

En Martinique, l'hôtel de la collectivité territoriale à Cluny (Fort-de-France) a aussi été jeudi la cible d'une action des opposants à l'obligation vaccinale et au pass sanitaire, mais dans des proportions moindres. Des manifestants ont bloqué l'accès à l'hôtel de la collectivité avec des palettes, branchages et poubelles, a constaté l'AFP. Une délégation a finalement été reçue par des élus et les manifestants ont quitté les lieux en fin de matinée.

- Deux syndicalistes meurent du Covid-19 -

A noter que deux membres de l’intersyndicale, opposés à l’obligation vaccinale, sont décédés du Covid-19. Mobilisés contre l’obligation vaccinale, les deux hommes de 48 ans et 61 ans auraient été contaminés à l’occasion d’une réunion de travail avec la préfecture, comme d’autres participants, dont le préfet de la Martinique.

Le président de la Fédération des taxis indépendants de Martinique, Alain Decaille, est mort, lundi, à l’âge de 61 ans. Depuis le mois de septembre, il avait organisé plusieurs opérations escargot sur l’île pour dénoncer l’obligation vaccinale imposée à sa corporation. Atteint par le Covid-19, il avait été hospitalisé trois semaines et soigné en réanimation, d’après le CHU de Martinique.

Le président du Syndicat pour la défense des artistes martiniquais, Aimé Agat, est également décédé lundi, à l’âge de 48 ans, après avoir été hospitalisé en réanimation, selon les services hospitaliers. D’après des sources syndicales, ils auraient été contaminés à l’occasion d’une réunion de travail avec la préfecture. Les deux syndicalistes s’étaient engagés dans l’intersyndicale qui avait appelé à la grève générale le 22 novembre 2021, pour marquer son opposition à l’obligation vaccinale et au pass sanitaire.

Des barrages avaient été érigés sur l’île pendant une dizaine de jours, avant qu’un accord de méthode ne fût signé avec les autorités de l’Etat, mettant en place des ateliers sur sept thématiques différentes. C’est après l’une de ces réunions de travail que plusieurs personnes avaient été déclarées positives, dont des membres de l’intersyndicale et le préfet, Stanislas Cazelles.

" Je suis un exemple parmi d’autres de gens qui malheureusement, vaccinés, ont quand même eu le Covid. Mais ça illustre la protection du vaccin, c’est-à-dire que j’ai eu des tout petits symptômes pendant deux jours, et après plus rien ", a souligné le préfet après dix jours d’isolement, à l’occasion de sa première sortie, qu’il a faite dans un centre de vaccination éphémère.

www.ipreunion.com avec l'AFP

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