Massacre

Des dizaines de manifestants tués par la police au Kazakhstan

  • Publié le 6 janvier 2022 à 11:06
  • Actualisé le 6 janvier 2022 à 13:32

Des "dizaines" de manifestants ont été tués par la police dans la nuit de mercredi à jeudi alors qu'ils tentaient de s'emparer de bâtiments administratifs au Kazakhstan, le pays étant en proie à des émeutes chaotiques.

Le mouvement de colère, débuté dimanche en province en raison d'une hausse des prix du gaz, s'est ensuite étendu à la plus grande ville du pays, Almaty, où il a viré à l'émeute, les manifestants s'emparant de bâtiments administratifs et brièvement de l'aéroport, tandis que les pillages se sont multipliés.

Face au chaos, la Russie voisine et ses alliés de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) ont annoncé l'envoi d'une "force collective de maintien de la paix" au Kazakhstan, à la demande de ce pays d'Asie centrale.

Le président kazakh, Kassym-Jomart Tokaïev, a jusque-là échoué à calmer les protestations, malgré une concession sur le prix du gaz, la démission du gouvernement et l'instauration de l'état d'urgence et d'un couvre-feu nocturne dans le pays.

Jeudi, le porte-parole de la police Saltanat Azirbek, cité par les médias locaux, a fait état de "dizaines" de manifestants tués alors que ceux-ci tentaient de s'emparer de bâtiments administratifs et de commissariats.

"La nuit dernière, les forces extrémistes ont tenté de prendre d'assaut les bâtiments administratifs, le département de la police de la ville d'Almaty, ainsi que les départements locaux et les commissariats de police", a-t-il indiqué, ajoutant qu'une opération "antiterroriste" était en cours dans l'un des quartiers d'Almaty.

Les images diffusées dans les médias et sur les réseaux sociaux ont montré des scènes de chaos avec des magasins pillés et certains bâtiments administratifs investis et incendiés à Almaty, tandis que des tirs d'arme automatique pouvaient être entendus.

- "Gangs terroristes" -

Sur fond de problèmes dans le fonctionnement de l'internet, la porte-parole de la Banque centrale Oljassa Ramazanova a annoncé la suspension du travail de toutes les institutions financières du pays.

Résultat du chaos, l'uranium, dont le Kazakhstan est l'un des principaux producteurs mondiaux a vu son prix fortement augmenter, tandis que le cours des actions des entreprises nationales s'est effondré à la bourse de Londres. Le pays est une place forte du "mining" de Bitcoin, qui connaît également une forte chute.

Selon le ministère de l'Intérieur kazakh cité par des médias locaux, au moins huit membres des forces de sécurité ont été tués et 317 blessés. Le président kazakh a assuré mercredi que des "gangs terroristes" ayant "reçu un entraînement approfondi à l'étranger" dirigent les manifestations.

"Des groupes d'éléments criminels battent nos soldats, les humilient, les traînant nus dans les rues, agressent les femmes, pillent les magasins", a-t-il dénoncé dans une allocution télévisée mercredi.

Après une nuit de troubles qui a vu l'arrestation de plus de 200 personnes, des milliers de manifestants ont pris d'assaut le siège de l'administration d'Almaty mercredi après-midi, semblant en prendre le contrôle. La police a tiré grenades assourdissantes et gaz lacrymogène, mais n'a pas pu les empêcher d'entrer, selon des journalistes de l'AFP.

- Bâtiments incendiés -

Des médias locaux et témoins sur les réseaux sociaux ont rapporté que les manifestants s'étaient ensuite dirigés vers la résidence présidentielle dans la ville, qu'ils ont incendié, tout comme le bâtiment de l'administration de la ville et une chaîne de télévision.

Il était impossible jeudi d'avoir une vision complète de la situation dans le pays, journalistes et témoins ne pouvant plus être joints par internet ou par téléphone, qui étaient coupés.

La colère des manifestants est notamment dirigée vers l'ancien président Noursoultan Nazarbaïv, 81 ans, qui a régné sur le pays de 1989 à 2019 et qui conserve une grande influence. Il est considéré comme le mentor du président actuel, M. Tokaïev.

Cet allié du président russe Vladimir Poutine était également resté président du puissant Conseil de sécurité, mais M. Tokaïev a annoncé mercredi qu'il exercerait désormais lui-même cette fonction.

Le Kazakhstan, plus grande des cinq ex-républiques soviétiques d'Asie centrale et principale économie de la région, comprend une importante minorité considérée comme ethniquement russe. Il est d'une importance économique et géopolitique cruciale pour la Russie.

Moscou a appelé mercredi à résoudre la crise par le dialogue "et non par des émeutes de rues et la violation des lois".
Les Etats-Unis et l'Union européenne ont pour leur part demandé de la "retenue" à toutes les parties.

AFP

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