Pôle Nord

Pyramiden, cité abandonnée et présence russe dans l'Arctique norvégien

  • Publié le 12 février 2022 à 12:59
  • Actualisé le 12 février 2022 à 15:01

Buste de Lénine, Palais de la culture, bureaux du KGB... Pyramiden est un vestige d'utopie de l'Union soviétique mais Moscou tient à sa cité minière abandonnée dans l'Arctique, région devenue une priorité stratégique pour le Kremlin.

L'Arctique: la Russie espère y devenir la première puissance militaire et économique profitant des retombées financières du passage du Nord-Est, route maritime entre l'Europe et l'Asie qui se développe avec le recul des glaces. Et de même que dans les eaux gelées du Nord elle fait naviguer une flotte de brise-glaces nucléaires, elle garde à l'Ouest un pied dans l'archipel norvégien du Svalbard (Spitzberg), zone démilitarisée très loin au-dessus du cercle polaire.

S'il a attribué à la Norvège - aujourd'hui membre de l'Otan - la souveraineté sur l'archipel, le traité de Paris de 1920 prévoit que tous les Etats signataires - dont l'URSS à l'époque - peuvent s'y livrer à des activités économiques.

Depuis 1931, dans le village de Barentsbourg, une communauté minière russe extrait ainsi du charbon des mines de la compagnie Arktikougol. Dans celui de Pyramiden, l'activité a cessé en 1998 faute de rendement et les mineurs sont partis.

A première vue, c'est un village fantôme. Pas d'habitants hormis une poignée de Russes qui font tourner un hôtel à la mode très soviétique et des ours polaires face à qui on peut se retrouver nez-à-nez.

Mais si tout est obsolète, rien n'est détruit, a constaté un photographe de l'AFP. Les bâtiments, construits pour durer, sont juste lézardés par des décennies de rudes hivers. Les rails du funiculaire, qui descendait les wagonnets de la mine, sont toujours accrochés à la montagne en forme de pyramide qui surplombe le village. Dans les bâtiments, c'est comme si les occupants étaient partis soudainement, prêts à revenir d'un moment à l'autre.

Dans les bureaux de l'administration, des fioles de minerai sont alignées dans les vitrines, des calendriers accrochés aux murs. Dans ceux du KGB, aux portes blindées, des fiches de mineurs sont étalées sur les tables. Dans les salles de cours, les dessins des enfants sont punaisés et la tasse du maitre traine encore sur sa chaire.

"Pyramiden est aussi importante que (les îles de) Groumant et (le village de) Barentsbourg, ce n’est pas uniquement un endroit de mémoire historique. Ce village n’est pas abandonné, il a été temporairement mis en veille", affirme à l'AFP le vice-directeur de l’Institut de recherches scientifiques russe de l’Arctique et de l’Antarctique à Saint-Pétersbourg Iouri Ougrioumov.

Dans les années 1960-1980, Pyramiden a compté jusqu'à 1.200 Russes. Y être envoyé était considéré comme une récompense pour un mineur, explique un guide à l'AFP.

Située du côté occidental du rideau de fer, le village faisait alors figure de cité soviétique idéale, autosuffisante avec ses élevages de cochons et puissante avec son Palais de la culture, son cinéma de 300 places, sa piscine, son gymnase et son hôpital.

Aujourd'hui, la Russie y développe tourisme et recherches. Arktikougol a lancé sa compagnie touristique, et glaciologues, hydrologues, océanologues y mènent des travaux scientifiques. "Ici, il y a l’espoir d’un avenir intéressant", affirme M. Ougrioumov, également chef de l’expédition arctique russe sur l’archipel.

AFP

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