Guerre en Ukraine

La Russie annonce un cessez-le-feu à Marioupol, tout en bombardant d'est en ouest

  • Publié le 5 mai 2022 à 06:57
  • Actualisé le 5 mai 2022 à 07:15

La Russie a annoncé un cessez-le-feu unilatéral de trois jours à partir de jeudi dans l'aciérie Azovstal du port ukrainien de Marioupol, tout en multipliant les bombardements, de l'est jusqu'à des régions proches de la Pologne et de la Hongrie, pendant que l'Union européenne tentait de mettre en place un embargo sur le pétrole russe.

"Les forces armées russes vont ouvrir un couloir humanitaire de 08h00 à 18h00 heure de Moscou (de 05h00 à 15h00 GMT) les 5, 6 et 7 mai à partir du site de l'usine métallurgique Azovstal pour évacuer des civils", a indiqué mercredi soir le ministère de la Défense dans un communiqué.

"Sur cette période, les forces armées russes et les unités de la République populaire du Donetsk (unilatéralement proclamée par les séparatistes prorusses, NDLR) vont cesser le feu et les hostilités unilatéralement", a-t-il poursuivi, asurant que les civils ayant trouvé refuge dans l'usine seraient autorisés à gagner la Russie ou les territoires contrôlés par Kiev.

Le maire de Marioupol Vadim Boïtchenko avait affirmé plus tôt que d'intenses combats étaient en cours malgré l'assurance de Moscou de ne pas lancer l'assaut de cet immense complexe où sont retranchés dans des galeries souterraines datant de la Seconde Guerre mondiale des combattants ukrainiens et des civils sans nourriture ni médicaments.

"Avec le soutien de l'aviation, l'ennemi a de nouveau tenté de prendre le contrôle de l'enceinte de l'usine. Sans succès", a fait savoir dans la soirée l'état-major des forces ukrainiennes. Un commandant ukrainien du régiment Azov qui défend l'aciérie avait annoncé mardi que les Russes avaient déclenché "un puissant assaut" sur ce site, mais le Kremlin a démenti cette information mercredi.

 Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a appelé lors d'un entretien téléphonique le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres à aider à "sauver" les blessés se trouvant dans ces installations en ruines.Il a par ailleurs annoncé dans son message vidéo quotidien que 344 personnes avaient été évacuées mercredi de Marioupol et de ses environs vers la ville de Zaprorijjia, ville sous contrôle ukrainien située à quelque 230 km de Marioupol. "Il y a encore des civils. Des femmes, des enfants', a-t-il affirmé.

L'ONU a participé dimanche à l'organisation de l'évacuation d'une centaine de civils piégés à Azovstal, la dernière poche de résistance à Marioupol, une cité stratégique du sud-est presque entièrement contrôlée par les forces russes. "Il y a eu un moment où nous avions perdu espoir, nous pensions que tout le monde nous avait oubliés", a témoigné l'une des évacuées, Anna Zaïtseva, avec dans les bras son bébé de six mois, Sviatoslav.

- Proposition d'embargo -

 La Commission européenne a dans le même temps proposé un embargo progressif de l'UE sur le pétrole importé de Russie.Si les Etats membres de l'Union européenne donnent --à l'unanimité-- leur feu vert, "nous renoncerons progressivement aux livraisons russes de pétrole brut dans les six mois et à celles de produits raffinés d'ici la fin de l'année", a dit à Strasbourg la présidente de la Commission Ursula von der Leyen.

D'après des responsables européens, le projet de la Commission prévoit une exemption pour la Hongrie et pour la Slovaquie, deux pays enclavés et totalement dépendants des livraisons par l'oléoduc "Droujba", qui pourront continuer leurs achats à la Russie en 2023.

Les Hongrois ont cependant aussitôt rejeté la proposition "dans sa forme actuelle", jugeant qu'une telle mesure "détruirait complètement" leur sécurité énergétique. Une décision fustigée par le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba, selon lequel les Etats de l'UE qui refusent cet embargo se rendent "complices" des "crimes" russes en Ukraine.

- Bombardements tous azimuts -

Sur le terrain des opérations militaires, les forces russes ont continué mercredi leur offensive dans l'est, tout en frappant de nombreuses cibles dans l'ouest, de Lviv à la région montagneuse jusque-là préservée de Transcarpatie, non loin de la frontière hongroise. "Afin de détruire les infrastructures de transport de l'Ukraine, l'ennemi a tiré des missiles sur des installations dans les régions de Dnipropetrovsk, Kirovograd, Lviv, Vinnytsia, Kiev, de la Transcarpatie, d'Odessa et de Donetsk", a déclaré l'état-major de l'armée ukrainienne dans la matinée.

Dans la partie orientale, les Russes cherchent à "s'assurer le contrôle total des régions de Donetsk et de Lougansk et à maintenir un couloir terrestre vers la Crimée occupée", a-t-il ajouté. Une frappe russe a fait deux morts et onze blessés, tous des civils, dans le village de Chandrygolove, a déploré le gouverneur de la région de Donetsk Pavlo Kyrylenko. D'autres ont fait un mort et un blessé, un enfant, aux alentours de Kharkiv.

Dans la grande ville industrielle de Dnipro, des journalistes de l'AFP ont entendu une très forte explosion précédée de bruits d'avions. "Un bombardement en plein centre de Dnipro. Restez dans les abris", a conseillé son maire Boris Filatov. "Une autre frappe sur les infrastructures ferroviaires à Dnipro. Pas de victimes", a précisé le PDG des chemins de fer ukrainiens Olexandre Kamychine. Dans le sud, des explosions ont eu lieu à Mykolaïv, dont la population a également été appelée à demeurer dans les abris, ont annoncé les autorités locales.

Aux frontières nord de l'Ukraine, le Bélarus --un allié de Moscou-- a de son côté entamé mercredi des manoeuvres militaires "surprise", censées tester les capacités de réaction de son armée, a déclaré son ministère de la Défense. Et Moscou a annoncé dans la soirée que les forces russes avaient simulé des tirs de missiles à capacité nucléaire dans l'enclave russe de Kaliningrad située entre la Pologne et la Lituanie, deux pays membres de l'UE. Plus de 100 militaires ont participé à ces exercices.

 Les unités de combat se sont également exercées à des "opérations dans des conditions de radiation et de contamination chimique".La Russie a placé ses forces nucléaires en état d'alerte peu après l'envoi de ses troupes en Ukraine le 24 février.

- Responsabilités -

Pour son sixième paquet de sanctions contre la Russie présenté mercredi, l'Union européenne a en outre proposé d'exclure trois banques russes supplémentaires --dont Sberbank, le plus gros établissement russe-- du système financier international Swift. Le Royaume-Uni a aussi annoncé mercredi une nouvelle salve de mesures punitives, dont l'interdiction de fournir à la Russie des services tels que la comptabilité et le conseil, mais aussi des gels d'avoirs et des interdictions d'entrée sur son territoire. Le président américain Joe Biden a déclaré mercredi qu'il discuterait cette semaine avec les autres pays du G7 de possibles sanctions "supplémentaires" contre la Russie.

La Commission européenne préconise par ailleurs de sanctionner le chef de l'Eglise orthodoxe russe, le patriarche Kirill, qui a multiplié les sermons soutenant l'intervention militaire en Ukraine.

 De Chisinau, la capitale moldave, le président du Conseil européen Charles Michel a annoncé que les Européens prévoyaient "cette année de considérablement accroître (leur) soutien à la Moldavie en livrant des équipements militaires supplémentaires à ses forces armées".Et ce quelques jours après des attaques dans le territoire séparatiste moldave prorusse de Transdniestrie et après des propos fin avril du général russe Roustam Minnekaïev selon lequel la prise du sud de l'Ukraine permettrait aux Russes d'avoir un accès direct à cette région.

 Sur le front diplomatique, Moscou a décidé de boycotter une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU avec le Comité politique et de sécurité (COPS) de l'UE mercredi, illustrant une nouvelle dégradation de ses relations avec ses partenaires aux Nations unies.La Russie a interdit le même jour l'accès à son territoire à plus de 60 responsables japonais, dont le Premier ministre Fumio Kishida, en représailles aux sanctions prises par le Japon.

Quant à l'ex-président brésilien Lula, il a jugé que Volodymyr Zelensky était "autant responsable" du conflit que son homologue russe Vladimir Poutine, dans un entretien avec le magazine américain Time. "Je vois le président ukrainien être applaudi debout par tous les Parlements (du monde). Mais ce type est aussi responsable que Poutine. Une guerre n'a jamais un seul coupable", a lâché le favori de la présidentielle d'octobre au Brésil.

AFP

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