Municipales

Dans une ambiance "surréaliste", des électeurs attachés à leur "devoir"

  • Publié le 15 mars 2020 à 21:57
  • Actualisé le 15 mars 2020 à 22:46

"Ridicule", "surréaliste": Les Français qui ont voté dimanche pour les municipales soulignent l'importance de participer à un scrutin qui touche leur quotidien, mais aussi l'incohérence de la situation en pleine épidémie de coronavirus.

"Il y a plus risqué que d'aller voter: aller faire les courses, aller prendre sa baguette sans savoir qui l'a touchée. Et au moins, ici, on a pu prendre du gel hydroalcoolique", lance Jeanne, 70 ans, dans un bureau de vote de Dijon.

Si le taux d'abstention s'annonce historique, les Français rencontrés dimanche par l'AFP à travers la France soulignent l'importance du scrutin, confient leur "peur" qu'il "ne soit pas représentatif de la pensée des citoyens", ou relativisent le danger à se rendre dans un bureau de vote en pleine crise sanitaire.

Mais l'ambiance est particulière, quelques heures seulement après l'annonce d'un durcissement des mesures de confinement samedi soir, ordonnant la fermeture des cafés, restaurants, discothèques et cinémas.

Selon le maire de Bordeaux Nicolas Florian (LR), entre 20 à 30 assesseurs ont fait défection et la nécessaire réorganisation de ceux restant disponibles a été compliquée par le fait que les tramways ne circulaient pas dimanche matin.

Dans la ville médiévale de Villeneuve-les-Avignon (Gard, 12.000 habitants), un bureau de vote proche du centre n'avait vu qu'une vingtaine d'électeurs en milieu de matinée, quand les clients se pressaient pourtant dans la boulangerie-pâtisserie.

Jacques, 71 ans, juge tout ça "surréaliste". "Si Macron et son gouvernement annoncent que tout ferme à la veille d'une élection, on ne voit pas comment les conditions démocratiques peuvent être assurées. (...) Il va y avoir une abstention encore plus massive que prévue, cela minera encore la légitimité des élus", s'inquiète-t-il.

- "Deux poids deux mesures" -

A Toulouse, Camille, une fonctionnaire de 28 ans, s'émeut d'une "forme d'incohérence" du message gouvernemental, "entre l'appel à rester chez soi et le maintien du vote".

Un électeur lillois âgé de 60 ans, Thierry Gradt, dit être "venu seulement parce qu'on veut éviter que cette situation profite aux extrêmes". "C'est ridicule d'avoir maintenu cette élection" et "on n'a pas d'informations sur la manière dont ça va se passer pour le second tour: est-ce que ce sera maintenu ou pas?", s'interroge-t-il.

Pour Serge aussi, un conducteur d'autocars de 50 ans inquiet pour son entreprise, c'est clair: il fallait reporter. "Surtout dans la mesure où ils empêchent les commerçants et les restaurants de travailler", ajoute-t-il en critiquant un "deux poids deux mesures".
Stocks de stylos, gel hydroalcoolique, gants et masques pour les assesseurs ou marquages au sol: la totalité des moyens pour limiter la propagation du virus ne sont pas toujours disponibles dans les bureaux de vote, mais les électeurs s'adaptent.

On évite de toucher les rideaux des isoloirs, on vient avec ses propres stylos, ses propres gants et pour limiter la promiscuité, on ralentit les entrées dans les bureaux quand des personnes âgées patientent dans la file d'attente.

"Non, vous ne me donnez pas votre carte d'identité, vous me la montrez", ordonne une assesseure à un électeur dans un bureau bordelais. "Et pour le coup de tampon sur la carte électorale, vous posez d'abord votre carte sur la table".
Ceux qui se sont déplacés disent aussi l'importance de ce scrutin local.
"Voter, c'est un devoir", assure en se frottant les mains au gel hydroalcoolique Barbara Martinez-Londono, une Dijonnaise de 20 ans, qui vote pour la première fois.

A Marseille, Camille, une designer qui préfère taire son nom de famille, tient à voter, "surtout après les effondrements d'immeubles qui ont fait des morts rue d'Aubagne en 2018 et puis parce que c'est la fin de l'ère Gaudin".

"Le maintien des élections d'un point de vue sanitaire, ce n'est peut-être pas très prudent", admet à ses côtés l'assesseure Marie-José, une infirmière de 47 ans, convoquée au dernier moment suite à des désistements.
Mais "moi, demain je vais bien devoir reprendre mon poste, le métro, alors je suis plutôt dans la logique qu'il faut bien que la vie continue".

AFP

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