Gestion des mouches des légumes à La Réunion

Les bons résultats de Gamour

  • Publié le 14 juin 2010 à 04:00

Le dispositif Gamour (gestion agroécologique des mouches à La Réunion) est un franc succès, selon un rapport publié par la chambre d'agriculture. Grâce à ce programme, les agriculteurs ont enregistré en 2009 une forte baisse de l'utilisation des insecticides couplée à une réduction des pertes agricoles pouvant aller jusqu'à 25%. Le dispositif est poursuivi en 2010 avec pour objectif d'améliorer encore les rendements.

Le dispositif Gamour s'inspire d'un programme similaire mené à Hawaii depuis 1999. Les bons résultats qui y ont été enregistrés ont convaincu les autorités à l'adapter sur notre île, afin de "développer une agriculture durable pour le maraîchage", une première en France.

En effet, les principaux ravageurs de cultures de cucurbitacées sont les mouches des légumes. Ces insectes pondent leurs ?ufs dans le légume, à travers la peau. Les oeufs éclosent en donnant des asticots qui dévorent la pulpe et rendent le légume impropre à la vente. Les dégâts occasionnés sont colossaux puisque, sans protection, les pertes atteignent souvent la totalité de la production.

Face à ce fléau, des solutions agrochimiques ont été mises en place, c'est à dire l'épandage massif de pesticides. Mais elles se sont avérées "peu efficaces, coûteuses et néfastes pour l'environnement ainsi que pour la santé humaine", note le rapport.

Ce constat établi, le Cirad, en partenariat avec la chambre d'agriculture, met en place un programme de gestion agroécologique des mouches à La Réunion. Dans ce type de programme, les pratiques agricoles sont préventives et non plus curatives comme c'était le cas avec l'agrochimie. L'objectif, prévenir ou réduire les risques d'infestations ou de pullulations de bioagresseurs comme la mouche des légumes.

En pratique, Gamour est l'application combinée et à grande échelle de techniques qui ont prouvé leur efficacité : "la prophylaxie, l'utilisation d'attractifs alimentaires sur des plantes pièges, le piégeage sexuel et la protection des insectes dits utiles", indique le document de la chambre d'agriculture. L'emploi de pesticides est donc limité au maximum.

À La Réunion, Gamour a débuté en 2009. Une trentaine d'agriculteurs se sont engagés à appliquer les méthodes préconisées pour protéger leurs légumes des mouches. Ils sont répartis dans trois zones, à savoir Salazie, L'Entre-Deux et Petite-Ile. Dans un premier temps, de septembre à décembre 2009, les épandages insecticides classiques ont été pratiquement supprimés. La quasi-totalité des légumes produits durant cette période (courgette, citrouille et chouchou principalement) l'ont été sans aucun traitement curatif.

Dans le même temps, la production a été maintenue à un niveau élevé et les pertes causées par les mouches n'ont pas dépassé 20 à 25% de la production. D'après les agriculteurs, ces pertes sont inférieures ou égales à celles constatées habituellement avec un ou deux traitement insecticides hebdomadaires durant cette même période.

La seconde période, en janvier et février 2010, a été plus difficile. Deux raisons à cela selon le rapport de la chambre consulaire. "D'une part, les conditions climatiques du plein été sont favorables aux mouches. D'autre part, les fortes pluies et des complications technico-logistiques ont gêné la pleine application des pratiques Gamour". Conséquence, le dispositif n'a pas pu être appliqué correctement et les dégâts n'ont pas pu être limité même si les agriculteurs ont repris l'utilisation des insecticides.

Mais le projet "donne à nouveau pleine satisfaction depuis mi-février". Les populations de mouches dans les zones pilotes sont de nouveau en baisse. Les agriculteurs reprennent la production de légumes sans insecticide et enregistrent des pertes très faibles (25% au maximum).

"Actuellement, nous considérons que nos résultats sont globalement bons puisque notre écho auprès des agriculteurs est largement positif et que l'utilisation des insecticides a été très fortement réduite voire supprimée. Cependant, quelques points sont à améliorer afin que l'action 2010 dépasse les difficultés que nous avons rencontrées en 2009", peut-on lire dans le rapport de la chambre d'agriculture.

Il s'agit notamment d'améliorer le "paquet technique" destiné à lutter contre la mouche des légumes, la mise en place de nouveaux attractifs ou de nouvelles plantes pièges. L'autre objectif est la formation des agriculteurs partenaires de ce projet ainsi que la mise en place d'une campagne de communication à destination du grand public.

Il s'agit de la dernière année de mise en ?uvre du projet. Quid de l'après Gamour? "Nous avons pour ambition de développer un mode de protection transférable, ce qui veut dire qu'à la fin du projet, les agriculteurs seront en mesure d'appliquer les recommandations techniques avec un encadrement minimal. Le transfert se fera dans les zones pilotes, mais sera également étendu au reste de l'île, petit à petit", indique le Cirad.

Par la suite, le concept pourrait être appliqué à d'autres mouches, d'autres ravageurs, d'autres cultures. Les bases théoriques sont en effet les mêmes (favoriser la biodiversité végétale, travailler à grande échelle), seule la technique varie d'un contexte à l'autre.

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