La bactérie "tueuse" fait des ravages en Europe

La Réunion ne cède pas à la psychose

  • Publié le 31 mai 2011 à 06:00

Depuis une dizaine de jours, une forme virulente de la bactérie "Escherichia coli enterohémorragique" (Eceh) fait des ravages en Europe et plus particulièrement en Allemagne où on dénombre plus de 10 morts et plusieurs centaines de malades. Alors que l'inquiétude monte en Europe où plusieurs cas d'infection ont été détectés, La Réunion ne cède pas à la psychose.

La bactérie E.coli enterohémorragique peut provoquer de simples diarrhées ou des diarrhées hémorragiques, jusqu'à des troubles rénaux sévères, voire mortels, connus sous le nom de syndrome hémolytique et urémique (SHU). Elle touche essentiellement les enfants de moins de 15 ans. Ce qui inquiète les autorités, c'est que la souche détectée en Allemagne touche aussi les adultes en bonne santé. Elle peut-être plus sévère que la grippe porcine, selon le centre européen de prévention de contrôle des maladies. En France, quatre cas pourraient être liés à cette bactérie "tueuse".

Selon les premiers résultats des études épidémiologiques, la bactérie serait attribuée à un concombre produit en Espagne, dans la région d'Alméria. Mais pas que. D'autres crudités font l'objet d'une attention particulière des services sanitaires européens. C'est le cas de la tomate et de la salade. Des analyses sont en cours pour connaître l'origine exacte de cette souche. Les conclusions devraient être connues dans le courant de la semaine.

A La Réunion, aucun cas autochtone ou importé n'a été détecté, selon la CIRE (cellule interrégionale d'épidémiologie). Mais les services sanitaires sont vigilants, comme l'indique Laurent Filleul, directeur de la CIRE. "Nous suivons de très près l'évolution de la situation en Europe. Nous avons également mis en place un système de surveillance et d'alerte des médecins afin de remonter tout soupçon de présence de la bactérie sur l'île", détaille Laurent Filleul. Le responsable de la cellule interrégionale dit "attendre les résultats des analyses en cours en Europe" pour juger des risques d'introduction de la bactérie sur l'île.

Les agriculteurs quant à eux ne semblent n'avoir aucune crainte et affirment ne pas ressentir d'inquiétude de la part des consommateurs. Pour preuve, des bazardiers interrogés au petit marché de Saint-Denis expliquent qu'ils n'ont pas enregistré de baisse des ventes des légumes frais depuis la médiatisation des premiers cas en Allemagne. "Les clients savent que cette bactérie ne concerne pas La Réunion. Ils ne changent donc pas leurs habitudes de consommation", explique Cyrille qui vient tout juste de vendre un concombre à une cliente.

Bruno, un autre bazardier, n'hésite pas à plaisanter avec les consommateurs : "non madame, ce concombre ne vient pas d'Espagne". Il est vrai qu'il est rare de voir des légumes frais importés sur les étals réunionnaises. "Heureusement", s'exclame Joël Sorres, président de l'association réunionnaise des organisations de producteurs des fruits et légumes. "La Réunion est autosuffisante dans la production de ces légumes (salades, tomates, concombres - ndlr)", assure-t-il. "Les rares fois où on en importe, c'est suite à des dégâts cycloniques", rappelle-t-il. Ce qui n'est pas le cas actuellement.

"Il n'y a aucun de risque de trouver des concombres d'Espagne sur nos étals actuellement", insiste-t-il pour rassurer la population. Le syndicaliste écarte aussi le risque d'une introduction de la bactérie via des engrais organiques. "À La Réunion, on importe essentiellement de l'engrais chimique. Les services sanitaires sont très pointilleux. Ils ne laisseraient pas n'importe quels engrais organiques pénétrer sur le territoire", commente-t-il.

Jean-Pierre Avril, président du pôle de compétitivité Qualitropic, tient le même discours rassurant : "il n'y a aucun risque à La Réunion". Et quand bien même la bactérie arriverait à La Réunion par un moyen ou par un autre, "le foyer d'origine serait facilement identifié", souligne-t-il.

"Les cultures sont assez éloignées les unes des autres sur l'île, ce qui évite les contaminations", explique-t-il, égratignant au passage les méthodes de culture en Espagne, où la souche trouverait son origine. "Là bas, les cultures sont hyper concentrées sous serres dans un souci de productivité. Le revers de la médaille, c'est qu'en cas de contamination, la bactérie va rapidement proliférer. C'est ce qui se passe actuellement", analyse-t-il. "Il faut continuer à privilégier la production locale pour atteindre l'autosuffisance et prévenir toute introduction de bactérie sur l'île", termine l'agriculteur.

Mounice Najafaly pour
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