Visite de la ministre de la Justice

Christiane Taubira à La Réunion début mai : un personnage... et une ministre polémique

  • Publié le 22 avril 2013 à 05:00

Christiane Taubira, ministre de la Justice et garde des Sceaux, devrait accomplir un voyage officiel à La Réunion, au cours des premiers jours du mois de mai. Si le motif exact de ce déplacement n'est pas encore connu de même que le détail de son programme, la ministre se soumettra à quelques rituels protocolaires de saison, ainsi du traditionnel dépôt de gerbe pour la Commémoration des victimes et héros de la seconde guerre mondiale le 8 mai 2013, sur le site du Monument aux Morts dionysien...

A la veille de l'Ascension, cette ministérielle présence risque fort de ressusciter l'ardeur des opposants locaux au "Mariage pour tous", quand bien même la majorité parlementaire aura d'ici-là adopté définitivement le texte qu'ils combattent ; et pour cause, en se fondant sur la "jurisprudence" CPE, à savoir le retrait en 2006, du texte de loi sur le Dispositif première embauche, pourtant promulgué, les tenants nationaux et réunionnais du "mariage homme-femme" estiment être dans leur bon droit en maintenant leur pression contre le gouvernement et ses représentants. Ils invoquent pour ce faire la position tenue en 2006, par le PS, et François Hollande en personne, dans la radicalisation de la "rue" contre un texte voté par la représentation nationale. A l'époque, consécutivement au retrait du CPE, le Parti Socialiste et François Hollande son Premier secrétaire, avaient déclaré : "Les socialistes, qui ont pris leur part dans ce mouvement, et notamment au Parlement, se félicitent de cette issue, même si nous restons vigilants par rapport à la nouvelle proposition de loi afin que les dispositions abrogées ne soient pas réintroduites subrepticement…"

Dans ce contexte fortement polémique, Mme Taubira qui s'est imposée comme la pasionaria du "Mariage pour tous", suscite de fortes animosités, y compris au parlement, où son comportement et ses discours souvent provocateurs ont induit des débats pour le moins houleux. Ainsi, la semaine dernière, à l'Assemblée nationale, pour la seconde lecture du projet sur le mariage pour tous, Mme Taubira s'est fait remarquer en fredonnant, en ouverture de séance "Le temps des cerises" - une chanson qui évoque la résistance des "Communards" - et dont l'appropriation par la ministre, assimilait symboliquement les opposants au "Mariage pour tous" aux continuateurs modernes des auteurs du massacre de la Commune de Paris…
 
Un paradigme politique renforcé par  l'usage d'un vocabulaire agressif, Mme le Garde des Sceaux, stigmatisant  "les cracheurs de haine, qui font acte de violence, avec ceux qui insultent des élus de quelque bord qu'ils soient (…) les factieux qui mettent en question les prérogatives mêmes de celles et ceux qui, dans les hémicycles, se font les porte-voix outrés du mouvement anti-mariage pour tous…"
Au-delà des critiques liées à ce dossier et que ne manqueront pas de reprendre les membres du collectif réunionnais "Tous pour le mariage homme-femme", qui réclament le retrait pur et simple projet de loi du gouvernement, visant à ouvrir le mariage et l'adoption aux couples de même sexe - tout en se proclamant du "respect de l’égale dignité de tout être humain, quels que soient son sexe, son orientation sexuelle, son enracinement ethnoculturel, sa religion ou sa non croyance, ses idées politiques…" - Mme Taubira est mise en cause dans sa qualité et son action de ministre de la Justice et garde des Sceaux.
 
Philippe Bilger, magistrat honoraire et blogueur émérite, a signé le 12 avril dernier, une philippique, qui pour être des plus laconiques, sonnait comme un terrible réquisitoire politique : "Je constate qu'on a absolument aucune politique pénale, Christiane Taubira a été enivrée par le succès parlementaire du mariage pour tous (…) Christiane Taubira a inventé l'action verbale (…) pour le reste c'est un garde des Sceaux de l'inaction".
 
Par ailleurs le "turn over" des membres de son cabinet est montré du doigt qui fait l'objet d'un véritable feuilleton dans les titres nationaux. On joue aux chaises musicales avec les magistrats, ainsi de Christian Vigouroux, directeur de cabinet nimbé de l'aura élyséenne, qui rejoint le Conseil d’État après un bref passage Place Vendôme, prestigieux ministère qu'il abandonne sans regret après Valérie Sagant, ex-conseillère des politiques pénales, partie en janvier dernier. Michel Debacq, conseiller diplomatique, donné partant, lorgnerait sur la Cour de cassation, es qualité d'avocat général. Laurent Vallée, maître des requêtes au Conseil d’État en service détaché auprès de Mme Taubira, plus précisément comme directeur des affaires civiles, vient de s'envoler pour Canal +.
 
Quant à Jean-François Beynel, directeur adjoint, qui fut juge à La Réunion, du temps de l'opération "mains propres" conduite par le Procureur Legras - il avait à cette époque prodigué quelques séances de formation au journalistes réunionnais - il est annoncé partant lui aussi pour la direction des services judiciaires, d'où est entre autres gérée la carrière des magistrats… 
 
Derrière ce mouvement, de fortes critiques quant au "management" de la ministre et de ses missi dominici, dont le conseiller spécial Jean-François Boutet, jugé "très proche", et très influent.
Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation, le conseiller spécial Boutet exercerait gracieusement aux côtés de Mme Taubira, en conservant ses activités professionnelles. Une position qui flirterait dangereusement avec la notion de conflit d'intérêt, les clients de Me Boutet pouvant trouver avantage à être représentés par un conseil stratégiquement positionné place Vendôme, quand bien même ce dernier s'en défende…
 
Par ailleurs, M. Boutet et Mme Taubira partagent un copinage partisan avec les Radicaux de gauche, l'un et l'autre ayant occupé de hautes responsabilités dans ce parti, aujourd'hui présidé par Jean-Michel Baylet, qui connaît quelques soucis de justice par les temps qui courent. Le sénateur de Tarn-et-Garonne, qui est aussi président du conseil général (en sus d'être PDG du groupe La Dépêche du Midi), se trouve mis en examen pour non respect des dispositions du code des marchés publics, et vient d'être renvoyé devant le tribunal correctionnel de Bordeaux, par le même juge Jean-Michel Gentil, qui a mis en examen Nicolas Sarkozy pour abus de faiblesse dans l'affaire Bettencourt… 
 
Christiane Taubira, que Pedro Almodovar aimerait faire tourner dans l'un de ses films, comme Dominique Strauss-Kahn, mais pour des raisons cinématographiques et esthétiques différentes, expliquait il y a quelque temps sur son blog (http://chtaubira.tumblr.com), travailler à mettre en œuvre "Une justice du 3ème millénaire" qu'elle définit comme l'opposé "d’une insultante indifférence aux victimes et d’un irrémédiable mépris pour les juges", soit, "une Justice accessible, par l’aide juridictionnelle accrue pour les plus démunis, le renforcement de la proximité, le recrutement de magistrats et greffiers pour réduire les délais d’audiencement. Une Justice efficace, par la hausse du budget des enquêtes et expertises, les innovations informatiques pour accélérer et sécuriser les procédures, des méthodes rigoureuses et efficientes pour prévenir la récidive et éviter de nouvelles victimes. Une justice indépendante qui, justement, lève toute suspicion sur les magistrats…" 
 
On ne peut en la matière que lui souhaiter bonne chance.
 
www.ipreunion.com
 
guest
1 Commentaires
Ricardo
Ricardo
10 ans

Calomniez, calomniez...il en restera toujours quelque chose.