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À la poursuite des emplois aidés...

  • Publié le 18 octobre 2014 à 05:00

À Paris, François Rebsamen, ministre du Travail, affirme que 350 000 offres d'emploi ne trouveraient pas preneurs ; à La Réunion, Monique Orphé, député PS, déplore 17 000 emplois aidés inemployés ; Pôle Emploi travaille sur la redynamisation de la recherche d'emploi quitte à user de l'aiguillon de radiations momentanées... Le temps politique est à l'optimisation du "boulot", à la lutte finale contre le chômage.

Monique Orphé, députée de la sixième circonscription et conseillère régionale PS, a récemment fait le "buzz" en dénonçant vigoureusement le fait qu'à La Réunion, 17 000 emplois aidés seraient en souffrance et en grand risque d'être perdus pour les Réunionnais au premier janvier 2015. Les responsables de cette situation seraient, selon la parlementaire socialiste, à trouver chez les élus locaux stigmatisés pour leur incompétence et une gestion communale politicienne et clientéliste de ces mêmes emplois aidés.

La Réunion figurant au nombre des régions européennes les plus affectées par le chômage selon les données d'Eurostat, la chose semble surréaliste, d'autant que La Réunion qui a bénéficié de l'attribution d'un fort quota d’emplois d’avenir - 5 000 - ne parvenait pas, fin 2013, à consommer plus de 64 % des postes à sa disposition ; à en croire les conseillers généraux du Groupe Modéré, la situation ne se serait guère améliorée, ces derniers déploraient le 17 septembre dernier, dans une motion relative à l'extension du dispositif à l'ensemble du secteur marchand, "les difficultés rencontrées par les collectivités locales et les associations, asphyxiées financièrement (…) de fait dans l'impossibilité d'épuiser les emplois d'avenir alloués par l'Etat au département de La Réunion…" et "le faible nombre d'emplois d'avenir consommés par le secteur marchand…"

Surréaliste encore, quand on sait que Gilbert Annette, maire de Saint-Denis, commune sur laquelle est partiellement élue Monique Orphé - le Chaudron notamment - a réclamé à cors et à cris, sur sa page facebook et jusqu'à l'Elysée, le 18 décembre 2013 - avant les élections municipales - sa volonté de porter le nombre de contrats aidés à 60 000 pour l'ensemble des Réunionnais, et donc d'ajouter 40 000 contrats supplémentaires à l'enveloppe existante.

La fin des "ti-contrats électoralistes"

Traditionnellement, barrages de routes à la mode saint-louisienne, manifestations devant les mairies annexes, menaces, voire séquestration d'élu, font partie des procédures d'obtention d'un contrat aidé, dans le cadre d'un clientélisme à l'antique bien compris. Et les notables de se défausser sur l'Etat indifférent à la réalité de la crise à La Réunion. Cette convention sociale paraît tomber en désuétude, la représentation édilitaire hésitant à assumer la responsabilité de cette distribution des contrats devant un électorat de plus en plus revendicatif. Ainsi, sous couvert de moralisation des pratiques, voire par souci d'efficacité, certaines communes ont transféré à un organisme tiers, privé ou public, mais supposément neutre en termes politiques, le privilège de distribuer les emplois aidés. Pôle Emploi est ainsi régulièrement sollicité.

A La Possession, où Vanessa Miranville avait fait de la dénonciation ostentatoire du clientélisme l'un des  piliers de son action, on a assisté à un étonnant pas de deux, avec, en un premier temps une forte communication sur la "dépolitisation" des contrats aidés et la fin des "ti-contrats électoralistes" (sic), via une convention avec Bac Réunion et le portage de 152 agents d'encadrement scolaire par la dite association. La même qui intervient sur Saint-Denis. Moins de deux mois plus tard, Vanessa Miranville faisait marche arrière par communiqué, annonçant un retour à une gestion municipale.

Pour dédramatiser la quête d'emploi, on va jusqu'à organiser des opérations de recrutement à grand spectacle, du "job dating" sur le modèle du "speed dating" des amoureux transis. Si ce n'est que la "vente" publique de 400 emplois, souvent peu valorisants, pour 2000 à 3000 demandeurs, ne paraît pas fondée à calmer la frustration des chômeurs au long cours.

Saucissonnage des contrats

Et si François Hollande, suite à sa dernière visite réunionnaise, a validé une expérimentation sociale pays, qui prévoit jusqu’au 31 décembre 2015, de porter le montant de l’aide de l’Etat pour les emplois d’avenir à 90 % du taux horaire brut du salaire minimum interprofessionnel de croissance, au lieu des 75% initialement arrêtés, il paraît douteux de voir le chômage endémique réunionnais être efficacement combattu par le seul empilement de mesures d'insertion, quelles que soient les modalités d'attribution des dits contrats.

D'autant qu'administrations et collectivités ont volontiers remplacé des postes pérennes par des emplois aidés, "oubliant" souvent de prodiguer les formations dont doivent bénéficier les contrats uniques d'insertion et les contrats d'accompagnement dans l'emploi (CUI et CAE). Par ailleurs, le succès des emplois d'avenir claironné par le gouvernement doit beaucoup au saucissonnage des dits contrats, qui, de CDI ou CDD de 1 à 3 ans, assortis d'une aide à l’emploi d’avenir de même durée, ont eu tendance à devenir, dans le secteur marchand, par la grâce et le pragmatisme des Missions locales, des contrats de 12 mois renouvelables trois fois…

Philippe Le Claire pour Imaz Press Réunion

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2 Commentaires
charlyrunbaie
charlyrunbaie
9 ans

Si le personnel communal est déjà suffisant ou pléthorique , pour quoi de nouvelles embauches de personnels ? surtout dans un contexte de contraction des dotations de l'Etat aux communes pour les années à venir.

Josephine , depuis son mobile
Josephine , depuis son mobile
9 ans

Sans parler de la contradiction d un Etat qui demande aux collectivites de reduire leurs personnels tout en leur demandant d embaucher des contrats aides et sans leur donner les moyens de le faire! Au vu de tout ca on voit bien la demagogie de l appel de la deputee Orphe!