Dès le début de sa visite à La Réunion et Mayotte ce jeudi 11 juin 2015, Manuel Valls a décidé de faire son mea culpa au sujet de son voyage Poitiers-Berlin pour voir la finale de la Ligue des champions. Ainsi, le Premier ministre a voulu d'emblée clore une polémique qui dure depuis cinq jours afin de se concentrer sur son déplacement officiel. Mais au contraire, le chef du gouvernement a relancé le débat à Paris, quitte à sacrifier les atouts - et les problématiques - de l'île qui auraient pu être mis en avant par les médias nationaux.
Il est 9 heures à La Réunion. Le directeur de la communication de Manuel Valls rassure les journalistes réunis à la préfecture de Saint-Denis : "je pense qu'il va répondre à votre question principale." Quelques minutes plus tard, le Premier ministre annonce en direct qu'il regrette son déplacement effectué à Berlin dans un point presse préparé dans l'urgence, communication de crise oblige. Il faut dire qu'un sondage publié la veille par BFM TV, affirmant que 77 % des Français se disent "choqués" par sa présence à la finale de la Ligue des Champions, a quelque peu précipité sa riposte.
Quelques instants après sa déclaration - qui fait à moitié office d'excuses - les rédactions parisiennes ont immédiatement relayé l'information. Les invités politiques des matinales, de gauche comme de droite, ont été vivement incités à réagir aux propos de l'actuel locataire de Matignon. Pendant ce temps, à La Réunion, Manuel Valls a continué sa visite ministérielle. Au programme : emploi, développement durable, économie, agriculture, formation… Autant de thèmes porteurs dans une île gangrenée par le chômage et une crise économique/canne/touristique/requin.
"Si je n’avais pas mis fin à cette polémique, elle m’aurait suivi pendant mes trois jours à La Réunion et à Mayotte. J’ai trop de respect pour les Réunionnais", a indiqué Manuel Valls, interrogé par Antenne Réunion et Réunion 1ère sur son allocution dionysienne. Mais en choisissant de s'exprimer officiellement cinq jours après son escapade berlinoise, le Premier ministre a non seulement commis une bourde en matière de com', mais il a également totalement éclipsé les enjeux de son déplacement à La Réunion. Une île qui aurait besoin d'être médiatisée en métropole que ce soit pour ses atouts ou ses problématiques hors normes.
Un black-out médiatique sur La Réunion
Ce jeudi, les grandes messes télévisées de 20 heures ont uniquement consacré leurs reportages au méa culpa du premier ministre et ses conséquences. TF1 a brièvement évoqué "un bain de foule dans un fief socialiste (à Saint-Joseph - ndlr) où il évoque la lutte contre le chômage". France 2 a dédié plus de 5 minutes "aux regrets de Manuel Valls" sans une seule fois parler de la situation du département ou de l'amour du Premier ministre pour l'île. En revanche, les deux chaînes ont bien diffusé des sujets consacrés aux secrets de fabrication des cahiers de vacances ou encore aux fautes d'orthographe des Français, alors que l'île compte plus de 100 000 illettrés.
Même chose du côté de France Inter : le journal de 19 heures est également revenu longuement sur les excuses du Premier ministre ainsi que sur le "comité d'accueil soigné" préparé par Patrick Lebreton à Saint-Joseph. "Bravo pour l'avion M. Valls ! Si c'était moi, j'aurais fait pareil !", capte le micro de la radio publique lors du bain de foule du chef du gouvernement dans le Sud sauvage. Traitement similaire pour le quotidien Le Monde daté du vendredi 12 juin, qui souligne tout de même que "l’île compte en effet près de 160 000 chômeurs (en hausse de 1,9 % en un an) dont 60 % ont moins de 25 ans."
En fait, il faut se tourner sur internet pour retrouver en détail les différentes étapes et annonces de Manuel Valls à La Réunion. "Malgré la polémique, Valls a parlé emploi, agriculture et énergie", titre L'Express qui reprend une dépêche de l'Agence France Presse. "Manuel Valls, une journée de contrition à La Réunion", raconte en détail le site du journal Libération. "Manuel Valls est venu parler d'économie avec un seul et unique objectif : l'emploi", souligne la rédaction en ligne de RTL.
C'est toujours mieux que rien pour l'île...
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