
Au total, 4555 avortements ont été pratiqués à La Réunion en 2013 (derniers chiffres disponibles - ndlr). Ce nombre est un peu plus élevé qu’en 2010 puisque la DREES n’en comptait que 4349. Dans son bilan 2013, la direction de la recherche comptabilise 21,1 IVG pour 1000 Réunionnaises âgées de 15 à 49 ans, soit un résultat plus haut que la moyenne nationale qui est de 15,6. Pour les femmes mineures âgées de 15 à 17 ans, on en compte 20,2. Globalement, les chiffres sont plus élevés dans les départements d’outre-mer : la moyenne de la Martinique, de la Guyane, de la Guadeloupe et de La Réunion est de 26,5 contre 15,3 IVG pour 1000 femmes en métropole, tous âges confondus.
Du côté du planning familial, les femmes qui viennent pour interrompre leur grossesse sont de plus en plus jeunes, d'après l'un des agents qui y travaille. "Malgré sa facilité d’accès", l’absence de contraception, les garanties de l’anonymat et de la gratuité favoriseraient le recours à l’IVG. "Des jeunes filles viennent pour l’IVG alors qu’on leur a prescrit la pilule un mois avant. Aujourd’hui c’est trop facile. A l’époque les femmes se cachaient de leur mari pour prendre une contraception, aujourd’hui on a tout et elles avortent quand même", déplore ce membre du personnel.
"Des jeunes femmes voulaient vérifier si elles n'étaient pas stériles"
Ce dernier affirme ne pas intervenir dans les choix de la patiente, mais s'étonne - voire s'inquiète - de certains cas qui se sont présentés à lui. "Nous avons eu des jeunes femmes qui voulaient vérifier si elles n’étaient pas stériles, mais qui ne voulaient pas forcément d’enfants. On a aussi des très jeunes filles, qui ont 12 ans parfois. D’autres n’ont pas 25 ans et ont déjà 6 enfants. Il y a aussi les victimes de viol intra-familiaux", témoigne-t-il. "
Cette augmentation du nombre d'avortement à La Réunion tracasse tout particulièrement Marie-Thérèse Baillif : "c’est très inquiétant, notre jeunesse est en mal de repères." Pour la présidente du collectif pour l’élimination des violences intra-familiales, les jeunes ne sont pas assez informés : "l’éducation à la sexualité est à revoir, nos jeunes mettent en danger leur santé. […] Sur le plan psychologique et personnel, l’IVG n’est pas quelque chose de facile, c’est une décision importante. […] Ce n’est pas tolérable qu’un adolescent devienne parent, il n’a pas encore la maturité nécessaire."
La pilule de plus en plus boudée
Dénonçant également le trop grand nombre de cas de violences sexuelles, Marie-Thérèse Baillif souhaite que les autorités "prennent cette affaire à bras le corps." Israël Nisand, chef du pôle gynécologie-obstétrique au CHRU de Strasbourg, estime quant à lui que "l'augmentation des IVG est liée à une mauvaise gestion de la crise française de la contraception orale. L'anathème a été jeté sur les contraceptifs de 3e génération." "Beaucoup de femmes ont arrêté la contraception orale sans la remplacer par une autre méthode médicale de contraception. Il n'y a pas eu de tel scandale autour des pilules de 3e génération dans les autres pays", a-t-il commenté, interrogé par Le Figaro.
Pour rappel, l’interruption volontaire de grossesse est autorisée en France depuis 1975 suite à l'adoption d'une loi portée par la ministre de la santé Simone Veil. Une IVG peut s’effectuer par un processus médicamenteux avant cinq semaines de grossesse, ou par intervention si cette période de gestation est dépassée. De 15 à 18 ans, l’IVG ainsi que tous les moyens de contraception (pilules de première et de deuxième génération, implant, stérilet…) sont pris en charge à 100% par l’assurance maladie. Les plannings familiaux assurent par ailleurs un suivi totalement anonyme et gratuit.
Johanna Martin pour www.ipreunion.com
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