Le calme après la flambée épidémique

Covid-19 : avec son taux d'incidence le plus bas de France, Mayotte défie la logique

  • Publié le 18 juin 2021 à 11:26

C'est une évolution aussi surprenante que rassurante pour l'île de Mayotte. Avec un taux d'incidence de 8 pour 100.000 habitants, c'est le plus bas de France depuis six semaines déjà. Après deux vagues de Covid-19 violentes, entraînant une vraie saturation du système hospitalier, le département souffle enfin. Le résultat de plusieurs facteurs, mais que les médecins ont tout de même du mal à expliquer. (Photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

L’évolution de l’épidémie de Covid-19 a connu des étapes marquantes. Deux vagues, l’une en 2020, l’autre début 2021, ont frappé l’île. Le taux d’incidence, monté jusqu’à plus de 800, a aujourd'hui chuté au point de passer sous la barre des 10 pour 100.000 habitants. Sur les cartes de France, Mayotte est le seul département en vert.

Data.gouv.fr

En février, plus de 2.000 cas de Covid-19 étaient détectés en moyenne chaque semaine. De quoi asphyxier totalement le centre hospitalier de Mayotte (CHM), poussant à évacuer les malades vers le CHU de La Réunion pour espérer une prise en charge avant d’en arriver au décès des patients.

Aujourd’hui c’est une toute autre situation. Le dernier bilan de l’agence régionale de santé (ARS) de Mayotte fait état de 24 cas recensés entre le 5 et le 11 juin 2021. A La Réunion, plus de 1.200 cas ont encore été enregistrés en une semaine, selon le bilan de ce mardi.

Alors à quoi est due cette chute de l’incidence, faisant de Mayotte le département aux taux les plus bas de France ? "C’était au contraire l’un des territoires français les plus touchés en début d’année", se souvient le docteur Alain Domercq, président du Conseil interrégional de l’Ordre des médecins, qui regroupe La Réunion et Mayotte. "L’épidémie a été plus qu’explosive sur le département, les contaminations étaient exponentielles" rappelle-t-il. Au plus fort de la crise sanitaire, le taux de positivité a atteint 25,8%. C’est-à-dire qu’à ce moment-là, mi-février, un.e Mahorais.e sur quatre qui allait se faire tester sortait positif.ve au Covid-19.

Lire aussi - Mayotte : le nombre de cas positifs à la Covid-19 explose

- Une population très jeune -

La baisse des contaminations, aussi radicale que sa hausse, peut s’expliquer par plusieurs facteurs, selon Youssouf Hassani, responsable de la cellule épidémiologique Mayotte de Santé publique France. L’ensemble des mesures de freinage y a pleinement contribué, mais aussi la configuration démographique de l’île. Ainsi il faut aussi prendre en considération "la structure d’âge de la population qui est beaucoup plus jeune - 50% de la population a moins de 18 ans - avec peut-être beaucoup de formes asymptomatiques. "

Un avis partagé par le docteur Alain Domercq. "La forte hausse des contaminations a été aussi subite que violente, mais n’a pas duré très longtemps. Cette population très jeune a sans doute aussi favorisé la hausse des contaminations, puisque beaucoup n’ont pas été hospitalisés et n’avaient pas de symptômes".

Un terrain favorable à l’expansion du virus. De nombreux jeunes auraient ainsi pu être contaminés sans le savoir et seraient aujourd'hui à l'abri du virus. Il est en effet extrêmement rare (bien que possible) d'être touché deux fois par le Covid-19.

- Trop tôt pour parler d’immunité collective -

Alors cette multiplication des contaminations aurait-elle favorisé la mise en place d’une forme d’immunité collective ? Il est trop tôt pour en parler selon Youssouf Hassini. "Nous n’avons pas assez de données pour faire le lien entre l’immunité collective et cette chute du taux d’incidence. A ce jour, les données de surveillance virologique nous indiquent que seuls 7% de la population ont été diagnostiqués positifs au Covid-19".

Il en reste que cette propagation du virus a favorisé une forme d’immunité pour les habitant.e.s déjà touché.e.s par la maladie. Mayotte compte 19.378 cas cumulés de Covid-19 depuis le début de l’épidémie. Mais toutes les personnes asymptomatiques, et donc de nombreux jeunes, ne sont pas comptées. L'immunité pourrait donc être acquise par bien plus de Mahorais.e.s que les chiffres officiels.

- Un confinement (un peu) bénéfique -

S’il n’est pas le seul facteur à prendre en compte, le confinement à Mayotte en février-mars a joué son rôle dans la baisse des contaminations. Pour autant, celui-ci n’a pas été respecté à la lettre. Il a cependant permis de faire baisser les courbes, qui explosaient en ce début d’année 2021.

Lire aussi - Coronavirus : l'espoir d'une stabilisation de l'épidémie à Mayotte

"Le confinement à Mayotte, c’est un modèle difficile. Mes collègues là-bas me le disaient : impossible de faire respecter l’isolement, notamment dans les bangas" note le docteur Alain Domercq. La priorité est autre dans un tel contexte de pauvreté. Les indicateurs montrent cependant que les contaminations ont pu continuer à baisser dans ce contexte de confinement.

Santé publique France

- Un ensemble de facteurs -

Concrètement, aucune cause unique n’explique la situation de Mayotte et c’est bien un ensemble de facteurs qui amène à cette conséquence. Pour autant, les résultats sont surprenants. Même Youssouf Hassani, à Santé publique France, le dit : "nous aurons du mal à vous donner une réponse claire à cette question".

De son côté le docteur Alain Domercq remarque un revirement de situation "qui n’est pas rationnel". La vaccination n’est pas un élément de réponse à cette chute du taux d’incidence. "Le faible taux d’incidence que nous avons à Mayotte ne peut pas être expliqué par la couverture vaccinale puisque nous avons l’un des taux les plus faibles. En effet, au 15 juin, seuls 14,5% de la population avaient reçu une dose de vaccin, contre 45,9% en moyenne au niveau national, et 8,2% avaient un schéma complet de vaccination" détaille Youssouf Hassani. Par comparaison, 24,4% de la population totale de La Réunion a reçu une première dose. Depuis ce 15 juin, les mineurs âgés de 12 à 17 ans y ont également accès.

Si le Covid-19 semble avoir laissé Mayotte tranquille, la prudence est de mise et la situation sanitaire reste fragile étant donné le système de santé insuffisant sur l’île aux parfums. Mais les chiffres sont bons : le taux de positivité dépassé à peine le 1% tandis que seules quatre hospitalisations liées au Covid sont enregistrées actuellement au CHM. De quoi donner de l'espoir pour une sortie de crise sanitaire sur le 101ème département de France.

mm/www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

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10 Commentaires
cyril, depuis son mobile
cyril, depuis son mobile
2 ans

Quelle horreur cette "écriture inclusive" ; c'est illisible!

neurone 974
neurone 974
2 ans

Mathématiquement le taux d'incidence augmente quand on augmente le nombre de tests et il suffit de ne pas tester pour qu'il diminue....

phil
phil
2 ans

Merci pour cet article qui va permettre de comprendre que seule l'immunité collective fonctionne ... même si le discours unique est "vaccinez vous" ! Que le virus circule parmi les jeunes , protégeons les gramounes , les obèses , les diabétiques et tout ira bien sans vaccin !!
(Sauf que l'immunité collective est extrêmement dure à atteindre. Comme dit dans l'article, la situation à Mayotte est difficile à expliquer et est le résultat de plusieurs facteurs. La ligne d'Imaz Press reste inchangée : seul le vaccin peut permettre à court terme de se protéger du virus. Bonne journée - WEBMASTER)

fray
fray
2 ans

@La vaccination : vous avez raison de pas en dire plus, vu que vous n'êtes pas fichu de lire et comprendre la suite du paragraphe. à moins que ça soit de la malhonnêteté intellectuelle...

Soumission
Soumission
2 ans

Le peuple Réunionnais est tellement soumis et regrette son statut d'esclaves soumis et dociles qu'il a suivi tout ce que le Gouverneur a dit !!! Le Peuple a bu presque jusqu'à la lie son discours mais ne se réveille toujours pas. Le Peuple semble attendre encore une énième invention débile de réduction des libertés comme des ânes...

Bruno Bourgeon
Bruno Bourgeon
2 ans

Le Dr Domercq est dans le déni de l'inutilité vaccinale. Ou alors... Les traitements préventifs font pleinement leur oeuvre (vitamines D et C, Zinc, ...). Ou encore : les jeunes ne sont pas contagieux, d'où l'inutilité vaccinale dans cette population.

La vaccination...
La vaccination...
2 ans

Encore moi, en tout cas merci à IPreunion d'avoir relayé cette information, car je ne la trouve nulle part ailleurs. Par contre tous les médias font état d'un taux "que" de 24% de vaccinés à La Réunion, ah les vilains réunionnais ce n'est pas bien... même si tu n'en comprends pas le but, rentre dans le rang et fais toi vacciner au mieux il ne se passera rien au pire tu auras exceptionnellement des effets secondaires graves, on ne peut pas t'en dire plus pour le moment car comme les autres tu fais partie d'une expérience nouvelle à l'échelle mondiale, pour les laboratoires : combien on peut empocher d'argent en un minimum de temps ' pour le autorités : jusqu'à quel point nous pouvons asservir une population ' On ne sait jamais cela pourrait servir un jour...

Eve
Eve
2 ans

La Réunion ' Saint-Denis 125,1 ' 976 ' Mayotte ' Dzaoudzi 6,1 ' Données les + récentes ! Le taux d'incidence baisse à La Réunion ! Mayotte : au + bas !!! Cela ne m'incite pas à aller me faire vacciner ! L'épidémie est -elle derrière nous ' Même sans vaccination ' L'espoir est là !

eve
eve
2 ans

Cette analyse ne nous apporte rien .. Si ce n'est que la vaccination n'est pas un élément de réponse ! Il faudrait avoir envie de trouver ! ... L'exemple mahorais pourrait servir ! Il faut comprendre pour le bien de tous !

La vaccination...
La vaccination...
2 ans

"La vaccination n'est pas un élément de réponse..." voilà une phrase qui m'interroge fortement !! Alors que dans le monde entier (ou presque) la vaccination est présentée comme "la" solution ! Je me garderai d'en dire plus de peur de franchir la ligne du camp des complotistes...