La précarité est toujours là

Fac payante : "une annonce inquiétante" pour les étudiants réunionnais

  • Publié le 22 janvier 2022 à 13:00
  • Actualisé le 24 janvier 2022 à 06:16

Le remboursement de l'université pour les boursiers est remis en cause. C'est ce qu'a fait comprendre le président de La République lors de la conférence des présidents d'université, jeudi 13 janvier 2022. La mesure toucherait un tiers des étudiants en France. La précarité étudiante, elle, s'est amplifiée depuis 2020 à cause de la crise sanitaire et les étudiants de La Réunion sont directement impactés. L'émergence d'établissements "à l'américaine" empêche les jeunes boursier.e.s de suivre des études supérieures à bas coût, selon certain.e.s. L'annonce est "inquiétante", alors que l'accès à l'université doit rester "un droit fondamental" (Photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

"On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants", un système de l’enseignement supérieur "où un tiers des étudiants sont boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale" a déclaré Emmanuel Macron lors de son discours de clôture du 50ème anniversaire du congrès des présidents d’université.

"Nous avons besoin d’avoir une nouvelle politique d’investissement pour pleinement projeter nos universités dans la compétition scientifique du 21ème siècle" déclare-t-il à 25min12. Regardez :

Le chef de l'Etat a d'ailleurs défendu son bilan pour l'enseignement supérieur avant de présenter les réformes à venir dont la fin de la quasi-gratuité des études. Il s'est aussi exprimé sur le budget alloué à l'enseignement supérieur, le quatrième plus important du gouvernement.

Depuis 2017, le budget alloué à l'Enseignement supérieur est passé de 22,2 milliards à 24,6 milliards d'euros, un budget trop conséquent pour Emmanuel Macron qui veut appeler à revoir la gouvernance des universités. "Oui, nous devons aller vers plus d’autonomie en termes d’organisation, de financement, de ressources humaines" a-t-il déclaré.


La ministre chargée de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal, elle, a mené plusieurs mesures en ce sens à savoir : l'autorisation aux universités à faire payer des frais d’inscriptions aux étudiants étrangers ainsi que la mise en place d'un système de sélection pour l'entrée en master à l'instar de Parcoursup. Le choix des étudiant.e.s sur dossier se veut plus pointu.

- L'université, l'ascenseur social -

"C’est une annonce inquiétante, c’est la première fois depuis longtemps que l’on remet la quasi-gratuité de l’université" explique Rudrigue Sautron, président de l'Unef à La Réunion, et pour qui l’accès à l’université est un "droit fondamental" de par son aspect d'"ascenseur social" pour toutes celles et tous ceux désireuses et désireux de faire des études.

La mise en place d’un système anglo-saxon, à l’instar des Etats-Unis où des étudiants doivent emprunter une somme colossale pour être en mesure de faire des études, favorise "la sélection sociale" selon le président de l’Unef. "Les étudiants des classes les plus riches pourraient faire leurs études, ce n’est pas normal" scinde-t-il.

Un non-boursier doit dépenser 2.100 euros pour les frais de rentrée et cela comprend la caution pour un logement dans le privé et les autres charges pour vivre. Aujourd’hui l’inscription en licence est de 170 euros, un montant qui pourrait augmenter dans les années à venir selon Rudrigue Sautron.

Keran Lin, étudiant boursier en deuxième année de Staps (sciences et techniques des activités physiques et sportives) estime que cette annonce "est une mauvaise chose car tout le monde a le droit de vouloir poursuivre ses études après le bac. Mettre fin à la quasi-gratuité de l’université pourrait fermer beaucoup de portes à des jeunes qui ont beaucoup de talent et de capacité" ajoute-t-il.

- Des aides insuffisantes pour la précarité étudiante -


Si Emmanuel Macron envisage la fin de la quasi-gratuité de l’université, ce dernier ne s’est pas exprimé au sujet de la précarité étudiante, "une situation qui dure depuis des années" juge Rudrigue Sautron. "La précarité étudiante est très importante à La Réunion car 63% des étudiants sont boursiers et bénéficient des aides sociales. Les échelons 6 et 7 sont les plus impactés" souligne-t-il.

Le Plan " 1 jeune, 1 solution", le service civique, le repas à un euro, l'aide d’urgence allouée par le Crous... Les mesures prises par le gouvernement sont diverses mais "restent insuffisantes pour aider les étudiant.e.s à sortir de la précarité" estime Rudrigue Sautron.

De son côté le Crous (Centre régional des œuvres universitaires et scolaires) compte 12.916 étudiant.e.s boursiers pour l’année 2021-2022 contre 12.016 en 2020.  Le Crous explique que "les étudiants demandent plus d’aides mais ce n’est pas lié à la précarité étudiante. Ils ne pensent pas forcément à une aide sociale".

Sur les 300 euros de bourse qu’il touche, Keran Lin "dépense facilement 200 euros pour l’inscription en club et l’achat de matériel", des dépenses nécessaires pour sa scolarité en Staps. "Les aides ne sont pas du Crous mais de la Région et c'est limité selon notre année d’étude" explique l’étudiant. L’aide obtenue en début d’année universitaire permet d’acheter un ordinateur, une tablette ou un autre appareil électronique "pour suivre les cours d’économie" ajoute-t-il.

- La vie étudiante, compliquée et coûteuse -

Keran Lin déplore la difficulté de la vie étudiante, surtout en Staps, une filière complexe où "le niveau régional demandé dans chaque sport pratiqué entraîne beaucoup de blessures". "Si tu es redoublant tu es mis de côté" explique-t-il. "Les cours sont souvent mal organisés, parfois tu reçois un mail pour te dire que tu as cours 15 minutes avant. C'est très compliqué quand tu prends les transports" dit-il.

La crise sanitaire a impacté de plein fouet les étudiant.e.s et cela depuis l'année 2020. Keran Lin a hélas l'impression que "rien n’a changé" depuis qu'il a commencé à étudier en Staps. D'ailleurs la fin des repas à un euro, les étudiants non-boursiers "doivent débourser 230 euros de plus par an" pour se nourrir selon lui.

L’Unef a organisé une distribution de colis alimentaires pour les étudiant.e.s les plus précaires, "une action qui n’a pas lieu d’avoir, car ce n’est pas normal qu’à aucun moment on ait pensé à aider les étudiant.e.s pour leur alimentation et pour leur protection. Ce sont des choses qui devraient être gratuites" insiste Rudrigue Sautron.

Pour faire face aux difficultés de la vie étudiante et notamment de la vie chère, l'Unef Réunion demande un complément de bourse de 100 euros pour les boursiers ultramarins ainsi que la mise en place d'une allocation autonomie calculée sur les besoins des étudiant.e.s et non le revenu des parents. "Le calcul sur le revenu exclut beaucoup d’étudiants alors que c’est eux qui vont en cours, pas leurs parents. "

Les étudiants sont inquiets après l’annonce d’Emmanuel Macron. Certains sont perdus, "ils ne savent pas s'ils doivent rester en cours à l’université" indique Rudrigue Sautron, "ils sont aussi inquiets pour la société de demain" souligne-t-il. Une crainte : que la fin de la quasi-gratuité de l'université entraîne une baisse considérable de futurs diplômés.

vl/www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

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8 Commentaires
yab
yab
2 ans

Votre première phrase est incompréhensible car mal tournée. (bonjour nous avons corrigé, merci à vous - webmaster)

Pauvreté'
Pauvreté'
2 ans

Ils sont pauvres' Entre leur voiture et tous leurs gadgets, j'ai l'impression d'avoir été plus pauvre qu'eux à l'époque sans m'en être plaint. Et je devais payer mes frais d'inscription et sans aucune bourse... parce que mon père chauffeur et ma mère caissière dépassaient le plafond. Alors, arrêtons l'indécence aujourd'hui! Les étudiants sont pourris gâtés . Beaucoup sont là pour tirer profit de bourses grassement distribuées.

Jeff
Jeff
2 ans

Au rédacteur de l'article : ne pourriez-vous pas arrêter d'utiliser l'écriture inclusive ' C'est ridicule, non reconnu par l'Académie Française et fort désagréable pour le lecteur. De plus, vous en oubliez l'utilisation pour un sur deux.Si vous vous concentriez plutôt sur l'orthographe et la tournure de votre texte. Un exemple : la première phrase de l'article (La fin du remboursement ... est remise en cause) est un non sens : on comprend par là que les étudiants réunionnais peuvent entretenir l'espoir d'une excellente nouvelle.

Heinrich Koffee
Heinrich Koffee
2 ans

Il y a 35 ans de cela je défilais aux côtés de mes amis étudiants, contre le projet de loi DEVAQUET; projet de loi qui instituait la fin de la gratuité de l'accès aux universités, et la mise en place de frais d'inscription fixés par les facs elles mêmes. 35 ans après quelle est la situation' Des sections entières sont des coquilles vides (cours en distanciel uniquement; cours qui ne consistent qu'en des séances de questions - réponses; appels à des prépas ultra chères et très sélectives...). Et là Macron, qui connait la situation précaire des étudiants - qui sont parmi ceux qui ont le plus "dégusté" pendant cette crise sanitaire - veut augmenter les frais et empêcher les remboursements' Serait-ce une stratégie pour être assuré de perdre' Après tout il ne fait pas bon être élu dans le contexte actuel...

titi45
titi45
2 ans

Les jeunes les prochains élections vote Macron '

HULK
HULK
2 ans

MACRON est le président des ultra-riches. Un psychopathe sans aucune empathie, méprisants l'égard des gueux. HOLLANDE l'a bien dit. Mais rassurez-vous,le "système" et les "bien-pensants" voteront pour lui et il sera réélu.

Lou974
Lou974
2 ans

Un véritable scandale pour les étudiants réunionnais, pour cette Fac où j'ai eu le bonheur d'enseigner de 1987 à 2005 mais aussi pour tous les étudiants français menacés comme jamais ! Cette nouvelle désastreuse pour cette île où j'ai le bonheur de vivre depuis 40 ans, on souhaiterait se réveiller vite et se dire que ce n'est qu'un cauchemar ! Combien de mes élèves de lycée, retrouvés à la Fac et devenus aujourd'hui, pour certains d'entre eux professeurs à leur tour. Ces jeunes, parfois enfants de parents très pauvres, se verraient ainsi privés d'accéder à l'Université ! Quel sens pourrait bien avoir notre rôle à nous enseignants ou ex-enseignants si nous voyions ainsi s'instaurer en mode majeur, ce que Bourdieu appelait déjà la reproduction !

Zozimé
Zozimé
2 ans

Son élection à été une catastrophe pour le pays encore une aberration avec la fin des universités gratuites mais va t'on avec ce président et ses mesures toutes plus injustes les unes que les autres que nous réserve t'il d'autre s'il est réélu '