Conclusions de l'étude CHARC

Migration, reproduction, alimentation : les raisons supposées de la présence des requins

  • Publié le 13 février 2015 à 10:32

En parallèle à l'annonce d'un retour partiel des activités nautiques par la création de "zones expérimentales opérationnelles", l'IRD (Institut de recherche pour le développement) a dévoilé ce jeudi 12 février les premières conclusions du programme CHARC sur l'étude du comportement des requins tigres et bouledogues. Il en ressort trois "facteurs clés" pour tenter d'expliquer la présence de ces squales autour des côtes réunionnaises : les comportements de migration, de reproduction et d'alimentation.

" Il y a trois ans, on ne savait rien sur les requins à La Réunion ", a rappelé Pascale Chabanel, scientifique à l’IRD. Et au bout de ces trois années d’étude, " on a des résultats qui expliquent beaucoup de choses ", a-t-elle annoncé. Les scientifiques de l’IRD ont ainsi identifié " trois facteurs clés " susceptibles d’expliquer la présence accrue des requins sur les côtes réunionnaises. À savoir le comportement migratoire, le comportement de reproduction et le comportement alimentaire.

Depuis 2011, les chercheurs du programme ont collecté des informations sur le comportement des requins tigres et bouledogues et sur les conditions environnementales de leurs habitats. " Pour cela, ils ont implanté des marques acoustiques dans 40 requins tigres et 39 bouledogues et des marques électroniques auto-détachables sur 5 requins (3 bouledogues et 2 tigres). Ceci afin de suivre leurs déplacements dans leur habitat naturel, grâce à un réseau de 52 stations d’écoute déployées autour de l’île ", explique l’IRD.

Les résultats dévoilés par l’institut sont issus des observations effectuées entre janvier 2012 et mai 2014 et concernent plus particulièrement les requins bouledogue. En effet, pendant cette période, le nombre de détection de requins tigre s’est avéré très faible. " Cela indique que leur habitat se situe plus au large que le réseau de stations d’écoutes déployées dans le cadre du programme ", en déduit l’IRD.

Des requins migrateurs

" Le suivi acoustique et satellite des requins bouledogue indique qu’ils ne sont pas présents de façon permanente sur la côte ouest de La Réunion ", écrit l’IRD. " Les requins suivis ont été capables d’explorer l’ensemble des côtes de l’île, et aussi de parcourir plusieurs kilomètres dans le milieu pélagique océanique. Ils ne semblent donc pas être assujettis aux zones littorales, même si ces dernières représentent un de leurs habitats majeurs ", poursuit l’institut, confirmant qu’ils sont " davantage présents sur la côte ouest entre Saint-Paul et Saint-Pierre pendant la période de transition été/hiver austral, c’est-à-dire de mars à juin ".

Par ailleurs, ces requins " changent d’habitat au cours de la journée, alternant une occupation diurne au large (zones de repos) et nocturne près des côtes ", ont constaté les scientifiques. Plus précisément, ils semblent se rapprocher des côtes en début d’après-midi (à partir de14 heures) et migrer dans la partie supérieure de la colonne d’eau, se rapprochant ainsi de la surface. Ils augmentent alors leur activité exploratoire, laissant supposer un comportement de chasse au crépuscule.

Étang du Gol et Saint-Gilles, sites d'accouplement

L’analyse des gonades (organes reproducteurs) des requins bouledogue indique que leur période de reproduction à La Réunion s’étalerait de mars à août, selon l’IRD. En 2013 et 2014, les chercheurs ont constaté la présence de plusieurs mâles et femelles autour de sites particuliers, qui correspondraient à des sites d’accouplement : l’étang du Gol et le port de Saint-Gilles. De plus, les analyses génétiques effectuées sur une même portée ont montré l’existence de deux géniteurs mâles, pouvant indiquer une compétition accrue entre mâles à cette période.

Une présence liée à l'état des ressources

L’analyse des contenus stomacaux et des prélèvements sanguins effectués sur les requins étudiés a révélé un régime alimentaire composé de ressources issues de milieux côtiers (essentiellement du poisson), rapportent les scientifiques. Les chercheurs ont ensuite confronté les données concernant la présence des requins marqués avec les indices de richesse en poissons, estimées à partir des données de débarquement fournies par les professionnels de la pêche.

Il ressort de ces comparaisons que " l’état des ressources disponibles près des côtes influence la présence des requins bouledogue ", souligne l’IRD. Ainsi, les chercheurs ont constaté une corrélation entre abondance en poissons et présence des requins marqués au large. Lorsque les ressources disponibles diminuent, les requins se rapprocheraient davantage des côtes pour se nourrir.

Les chercheurs ont également observé que des variables environnementales favoriseraient la présence des requins bouledogue près des côtes réunionnaises : hauteur de houle, pluviométrie, turbidité des eaux de surface.

Réunion, Afrique du Sud, Mozambique : une même population

Enfin, l’analyse génétique des échantillons de muscles de requins bouledogue provenant de La Réunion, du Mozambique et d’Afrique du Sud a révélé que ces requins partagent des gènes communs. Ainsi, ils interagissent entre eux et forment une seule et même population, ce qui n’était pas connu jusqu’à présent. Le taux d’échange entre individus reste toutefois à déterminer.

En conclusion, l’IRD estime que " le programme CHARC a permis d’identifier des facteurs clés ainsi que des périodes annuelles et journalières favorables à la présence et à la répartition spatiale des requins bouledogue près des côtes de l’île de La Réunion ", mais que " des analyses complémentaires restent encore à mener ". " L’acquisition de données additionnelles, sur les traits de vie des requins tigre et bouledogue notamment, permettrait de mieux cerner leurs modes d’occupation spatiale et de préciser leur rôle dans l’écosystème ", ajoute l’institut.

Ce jeudi, Pascale Chabanel a de nouveau insisté sur le fait que CHARC était " un programme d’amélioration des connaissances, et non un programme de gestion du risque ".

www.ipreunion.com

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2 Commentaires
Depain , depuis son mobile
Depain , depuis son mobile
9 ans

L'ironie du sort :finalement l'action de la réserve marine à long terme , aurait tendance à éloigner les requins les plus dangereux au large. Mais je vois déjà que les extrémistes vont refuser ces conclusions...

sharklove
sharklove
9 ans

voila qui met à mal les théories fumeuses des exités de la drumline et ciguatera. Il serait temps d'ecouter Mr Galvez, grand chasseur de requin qui connait son affaire lorsqu'il dit que les drumlines ne servent à rien sinon detruire et depenser.