Grève dans la fonction publique

La dernière manifestation avant le bac

  • Publié le 10 juin 2003 à 00:00

Plus de 25 000 personnes selon les syndicats, 5 500 selon la police, ont manifesté dans les rues de Saint-Denis ce lundi 10 juin 2003 pour réclamer le retrait des projets gouvernementaux de décentralisation et de réforme des retraites. La démission de Jean-Pierre Raffarin est désormais l'un des principaux mots d'ordre. Il s'agissait de la dernière manifestation avant le début des épreuves du bac le jeudi 12 juin prochain

Le secteur public a mobilisé en force, le gros de la manifestation étant constitué par les personnels de l'Éducation nationale. Le secteur privé était peu représenté.
"J'ai voté contre Le Pen pour pouvoir m'exprimer librement par pour me faire gazer" proclame une pancarte portée à bout de bras par un manifestant quadragénaire. Les violents affrontements qui ont opposé les forces de l'ordre et les grévistes le jeudi 5 juin devant le rectorat ont visiblement laissé des traces. C'est d'ailleurs une banderole disant "non à la répression policière" qui a été placée en tête de cortège. Les dirigeants syndicats ont pris place juste derrière. Le collectif emploi en danger devait être le premier à défiler en hommage au combat qu'il mène pour l'intégration dans l'Éducation nationale des 600 éducateurs embauchés en CEJ (contrat emploi jeunes) et dont le contrat arrive à terme le 30 juin (deux aides éducatrices sont en grève de la faim depuis vendredi dernier. L'une d'elle a été hospitalisée lundi). Finalement certains dirigeants syndicaux ont estimé que pour éviter toute suspicion de récupération, il valait mieux placer le collectif en milieu de défilé.

Par la rue Maréchal Leclerc

Le rendez-vous avait été fixé à partir de 9 heures 30 au petit marché. Après maintes tergiversations, la décision de faire passer la manifestation dans la rue Maréchal Leclerc - principale artère commerçante de la ville -, a été maintenue. Craignant d'éventuels débordements, les commerçants avaient demandé un changement d'itinéraire. La plupart d'entre eux ont gardé leurs rideaux baissés toute la matinée. Précaution inutile puisqu'il n'y a eu aucun incident.
Dès le départ de la manifestation vers 10 heures 30, il était clair que la mobilisation était massive. Banderoles, pancartes, marionnettes à l'effigie du Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, du ministre de l'Éducation nationale, Luc Ferry, ou du député-maire du Tampon, André Thien Ah Koon, s'étendaient à perte de vue. L'humour semblait être le "mot d'ordre" principal. Un petit groupe de manifestantes s'étaient couverts le visage et les bras de pansements rouges en "souvenirs des coups de matraques". L'une d'elles, le bras droit dans un faux plâtre, portait de la main gauche une pancarte disant "je ne peux pas corriger les examens".

"Pousse plus vite"

Un mannequin à la vénérable barbe blanche avait été confortablement installé dans un fauteuil roulant. À son cou pendait une pancarte "pousse plus vite mon fils, je vais être en retard au chantier". Brandissant des mitraillettes et des gourdins en plastique, d'autres manifestants faisaient mine de foncer dans la foule en criant "dernière sommation, nous allons tirer". Une pancarte haute en couleurs proclamait "Raffarin si tu fais ton 49.3, je garde mon 37.5" (allusion à l'article 49.3 de la Constitution autorisant l'adoption sans débat d'une loi par la majorité de l'Assemblée nationale, et au 37,5 années de cotisations pour obtenir une retraite à taux plein - ndlr).

Actions surprises

La tête du cortège arrivait devant la préfecture vers midi. Les derniers manifestants les rejoindront une heure plus tard. Les dirigeants syndicaux et ceux des différentes coordinations prenaient la parole à tour de rôle pour appeler à la poursuite de la mobilisation "si ce soir, il n'y a aucune annonce sur le retrait des deux projets de réforme (une rencontre entre le Premier ministre et les syndicats était prévue pour la fin de l'après-midi à Paris - ndlr)".

Déçus par le préfet

Vers 13 heures, une délégation du collectif emploi en danger conduite par Jean-Hugues Ratenon entrait en préfecture pour un entretien avec le préfet, Gonthier Friederici. Les discussions ont porté sur l'avenir des 600 aides éducateurs qui seront en fin de contrat le 30 juin. "Le préfet nous a dit que le gouvernement réfléchissait sur la question" lançait très déçu Jean-Hugues Ratenon à la sortie de l'entretien. Il soulignait qu'aucune réponse concrète n'avait été donnée par le représentant de l'État.
Les manifestants ont commencé à quitter la préfecture ans le calme vers 14 heures. Le mot d'ordre était de se retrouver devant le rectorat pour un grand pique-nique.

Incidents au Port

Plusieurs centaines de grévistes faisaient le déplacement. Un cordon de gardes mobiles se trouvait déjà sur les lieux, mais il n'y a eu aucune tension, l'ambiance restant bon enfant. Les derniers manifestants se disperseront en fin d'après-midi. À la nuit tombée, quelques galets ont lancé en direction des gendarmes. Ces derniers n'ont pas riposté. Les choses se très vite calmées.
Ce qui n'a pas été le cas au Port. En milieu d'après-midi, des magasins ont été cambriolés par des personnes circulant en 4x4. Le GIPN (groupement d'intervention de la police nationale) et la CDI (compagnie départementale d'intervention) sont intervenus. En début de soirée, plusieurs barrages enflammés avaient été dressés dans les principales rues de la ville où la tension était palpable.

Report des transferts

En début de soirée, l'on apprenait que le gouvernement avait décidé de reporter le transfert de tutelle de certains personnels non enseignants de l'Éducation nationale aux collectivités. Les conseillers d'orientation, les psychologues, les assistants sociaux se seraient donc pas concernés pour le moment. Le transferts des ouvriers et agents de service est maintenu.
En métropole, les syndicats ont estimé avec satsifaction qu'il y avait "une avancée". À La Réunion, l'intersyndicale maitient son mot d'ordre de grève pour le 12 juin mais appelle à ne pas boycotter ou bloquer les épreuves du bac.
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