
M. Dekokère, comment vivez-vous ce conflit ?
"Le sentiment que j’ai, c’est qu’on a sûrement des malentendus, que ces malentendus peuvent être levés, le tout c’est d’échanger. J’entends énormément de choses, je ne valide pas ce qui est dit. On n’attend qu’une chose, c’est que le dialogue soit ouvert et qu’on se rencontre. D’autre part, il me semble qu’il y a des salariés qui ont souhaité être à ces réunions et qu’ils ont été mis à la porte par leurs collègues représentant un syndicat. Je trouve dommage qu’on arrive à voir des groupes se créer parmi les salariés, parce que demain on va devoir travailler ensemble. On a réussi en 2014 à relever ce défi ensemble. La réussite c’est des chiffres, mais les chiffres viennent des éleveurs et des salariés, certes d’un mouvement insufflé par le conseil d’administration et la direction, mais les salariés ont réussi avec les éleveurs à relever ce challenge de plus d’un million de litres de lait en 2014."
Ce n’est pas cela qui est en cause, mais votre attitude et votre politique de management...
"Oui je l’entends. Échangeons. Il y a peut-être des incompréhensions de part et d’autre. En fonction des régions où on habite, on n’a pas forcément les mêmes façons de procéder. Il y a des incompréhensions. J’aime travailler avec les éleveurs, j’aime travailler avec mes salariés."
"J’ai un fonctionnement assez direct... Je suis du Nord..."
À quoi pensez-vous quand vous parlez de "régions différentes" et d’incompréhensions ?
"J’ai un fonctionnement assez direct... Je suis du Nord, j’ai travaillé dans d’autres départements de France, on n’a pas la même façon d’appréhender ou de comprendre les sujets."
On vous prête certains propos comparant des enfants à des chiens, et même la phrase suivante : "vous n’avez pas de chance, vous êtes noirs et réunionnais à la fois"...
"Je ne cautionne pas le deuxième propos et le premier est sorti de son contexte. Je ne répondrai pas plus que ça."
Reconnaissez-vous certains malentendus ?
"Il y a une nécessité d’avoir un dynamisme. On a fait beaucoup d’évolutions. Je peux comprendre les malentendus, qu’ils me les réexpliquent et qu’on reparte sur quelque chose de compréhensible de part et d’autre. Par contre, les objectifs doivent être menés ensemble et avec les compétences de chacun."
"Je suis directeur, j’ai des décisions à prendre"
On vous reproche un manque d’intégration dans le pays. Que répondez-vous ?
"J’ai de nombreux contacts non professionnels avec toutes sortes de gens, j’ai toujours été ouvert et ça m’a fortement choqué de lire dans la presse un dimanche que j'étais raciste."
Quand 90 % des salariés d’une entreprise sont en grève, ne se remet-on pas en cause lorsqu’on est manager ?
"Pensez-vous que même sans 90 % de salariés en grève on ne se remet pas en cause tous les jours ? Aujourd’hui, il y un souci, des difficultés d’échange, mais ce n’est pas aujourd’hui que je me remets en cause."
On vous reproche de penser avoir toujours raison, de trancher...
"Je suis directeur, j’ai des décisions à prendre et quand j’ai deux choix, je dois en faire un, donc je tranche."
"Il y a des salariés qui ne comprennent pas" cette grève
Etes-vous serein ?
"Serein, non, sinon ça voudrait dire que je ne me remets pas en question."
Vous sentez-vous incompris ?
"Incompris par certains, oui certainement. Mais il y a d’autres salariés qui ne comprennent pas, il y en qui me disent qu’ils aimeraient venir travailler mais qu’ils n’y arrivent pas, il y en a d’autres qui ne comprennent pas la situation de ces salariés qui sont présents devant le siège de l’entreprise."
Certains prétendent que les deux dernières sociétés que vous avez dirigées ont fait faillite. Qu’en est-il ?
"Sous ma direction, je n’ai jamais eu aucune faillite, ni aucune liquidation."
Combien d’éleveurs sont de votre côté ?
"Il ne faut pas polémiquer sur les chiffres. Le sujet c’est qu’il faut que la coopérative reprenne son travail, qu’on collecte du lait car c’est notre métier, qu’on puisse livrer des produits à nos adhérents. Il faut reprendre pour les adhérents, mais aussi pour les clients des magasins."
"Il y a des questions qui doivent être levées"
Par quels moyens allez-vous obliger les salariés à reprendre le travail ?
"Mais je ne souhaite pas les obliger ! Il faut qu’on soit autour de la table. Ce qui a été proposé par le conseil, c’était d’échanger en préambule ensemble avec les représentants du personnel, d’ouvrir cette discussion aux cadres dirigeants de l’entreprise, puis à tous les employés de la Sicalait qui le souhaitent. Il y a des questions qui doivent être levées."
Combien de litres de lait ont-ils été perdus depuis le début de la grève ?
"Le lundi c’est notre plus grosse journée, on a collecté 58 000 litres de lait, hier 40 000, en gros on a jeté 50 % de la collecte hier. Sachez qu’on a un client qui a des produits qui sont faits avec du lait entier, donc il y aura des produits transformés qui ne seront plus dans les rayons..."
S’ils obtiennent une majorité, les éleveurs peuvent-ils convoquer une assemblée générale extraordinaire ?
"Non, il faut lire les statuts de l’entreprise. C’est le conseil qui convoque une assemblée générale, ordinaire ou extraordinaire. Et c’est le tribunal qui peut contraindre éventuellement le conseil à convoquer une assemblée générale et/ou à nommer un administrateur provisoire."
www.ipreunion.com
5 Commentaire(s)
Par ailleurs on s'adapte à la culture dans laquelle on débarque sans préjugé d'un fonctionnement meilleur qu'un autre.
Les réponses de l'interviewé transpirent le néocolonialisme que les membres du conseil d'administration de la SICAlait semblent cautionner.
Ce directeur aurait-il eu le même comportement en Corse ?
Le gentillesse des Réunionnais les perdront.