Un usage exacerbé par la crise sanitaire

Addictions aux écrans : les plus jeunes frappés de plein fouet par l'hyperconnexion

  • Publié le 11 juin 2022 à 12:09

Depuis le début de la crise sanitaire et avec la prolifération des écrans dans le quotidien de nos enfants, on voit émerger un nouveau phénomène, celui des addictions aux ravages physiques et psychologiques. Troubles du sommeil, difficultés scolaires, isolement... Les conséquences de cette hyperconnexion sont multiples et touchent les enfants dès le plus jeune âge. Face à ce fléau, l'idée n'est pas d'interdire mais de maîtrise l'usage à travers l'adoption de règles destinées à limiter le temps d'écran des jeunes, sans cesse connectés. (Photo : rb/www.ipreunion.com)

Selon l’association SAOME (Santé addictions outre-mer), acteur central de l’addictologie à La Réunion, "les parents ont tendance à sous-estimer le temps passé par leurs enfants sur les écrans et n’ont ainsi pas conscience des risques réels auxquels ils sont ou ont été exposés".

L’âge d’exposition aux écrans des enfants diminue d’année en année. Cela commence même dès l’âge de trois ans. Le temps de consommation quant à lui augmente. La moyenne nationale étant de quatre heures d’expositions par jour pour un adolescent. De nombreux jeunes ultra connectés ne parviennent même plus à s’arrêter. Un quotidien difficile que vit Lucie, mère de famille. Maman d’un adolescent, elle n’arrive pas à faire décrocher son fils des écrans. "Le week-end, après l’école… c’est tout le temps." "Malgré des règles mises en place, difficile de se faire entendre, il est comme absorbé par son écran", dit-elle, désemparée. Dès lors qu’elle dit stop, Lucie nous explique que son fils vient régulièrement la voir pour lui dire qu’il s’ennuie. "Sans les écrans il ne sait plus quoi faire." Télévision, consoles de jeux… les jeunes ne peuvent plus se passer de ces outils.

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- Les garçons, premiers touchés par cette addiction -

À La Réunion, les garçons sont les plus fréquemment touchés par cette addiction. "Il s’agit principalement de jeunes adolescents chez lesquels il est fréquemment retrouvé des caractéristiques comme le TDAH (Trouble du déficit de l’attention avec/sans hyperactivité), les HPI (Haut potentiel intellectuel) ou qui présentent des troubles (phobie sociale, scolaire, anxiété réactionnelle, dépression…)", explique le Docteur David Mété, chef du service addictologie au CHU Nord.

Pour ces jeunes aux usages problématiques, "la prise en charge sera globale, familiale et psychologique après l’établissement d’une bonne alliance thérapeutique avec le jeune consultant", explique le médecin. Qu’en est-il de cette démarche ? "Elle émane généralement des parents", explique le docteur.

"Il s’agit pour nous d’établir une relation de confiance avec l’adolescent, sans être instrumentalisé par les parents", souligne-t-il. "On s’intéresse au jeune dans sa globalité, dans la dimension familiale avant de se focaliser davantage sur le problème addictif", ajoute le médecin.

Docteur David Mété explique, "en cas de problèmes psychologiques chez le jeune, il peut être proposé une prise en charge spécialisée et éventuellement une pharmacothérapie adaptée". Une prise en charge moins fréquente chez l'enfant que chez l'adulte.

- Le rôle des parents est déterminant –

"Dans bien des cas, c’est seulement un soutien à la parentalité qui s’avère nécessaire pour stopper l'usage excessif des écrans. Une aide donnée par les pédiatres, médecins et maisons de l’adolescent", explique le Docteur David Mété, chef du service addictologie au CHU Nord.

Des parents qu’il faut aider. "Les parents sont confrontés à des difficultés dans la gestion du temps d’écran avec une importante appétence pour les enfants", explique le Docteur David Mété.  "On rencontre parfois des parents dépassés par la situation et en difficulté pour établir des règles de fonctionnement, le soutien à la parentalité peut être important : limitation des heures de jeux, consoles et portables éteints à l'extérieur de la chambre la nuit…", ajoute-t-il.

Selon le spécialiste, qui s’exprime à titre personnel, il faut "apporter davantage de réponses au niveau de la régulation avec par exemple une obligation d'outils de contrôle : limitation du temps d'usage, filtrage des contenus inappropriés... tout en faisant la promotion d'un usage positif de ces outils qui appartiennent à notre quotidien et qui sont loin de n'avoir que des aspects négatifs".

Pour le chef du service addictologie du CHU, "l'objectif n'est pas de stigmatiser les jeux vidéo qui sont un loisir pratiqué par la quasi-totalité des jeunes aujourd'hui qui doivent demeurer un loisir et ne pas se transformer en impasse addictive". Chaque parent doit donc réfléchir à la place qu’il souhaite accorder aux écrans et comment l’encadrer.

Le docteur Mété ajoute même, "il faut également de la régulation face aux éditeurs qui créent des applications plus addictives afin de gagner davantage d'argent (pay to play, pay to win, etc)". "Il n'est pas rare que des parents mentionnent que leur enfant utilise leur CB à leur insu pour avancer dans un jeu ou acheter un nouveau skin)", explique le chef du service addictologie au CHU Nord.

- Les conséquences d’un usage excessif des écrans -

L’association SAOME (Santé addictions outre-mer), acteur central de l’addictologie à La Réunion, rappelle que l'hyperconnexion a "des conséquences sur le plan psychologique et social avec une désocialisation et des risques dépressifs". Elle pointe aussi plusieurs effets néfastes sur la santé "mauvaises postures, déséquilibres alimentaires, troubles du métabolisme, manque d’activité physique, troubles du sommeil, risques sur le plan cardiaque, fatigue visuelle" notamment.

Des conséquences sur les capacités intellectuelles des enfants (troubles de l’acquisition du langage, problèmes de concentration, de mémorisation) sont également recensés. Le Haut conseil de la santé publique (HCSP) note par ailleurs "une corrélation entre dépression et temps passé par les adolescents devant un écran dans un cadre sédentaire".

Le site "Le bon usage des écrans" conseille les familles qui font face à ce fléau. Il est notamment  question de limiter le temps d’exposition aux écrans, de s'intéresser à la pratique numérique de ses enfants et d'utiliser les écrans pour développer leur créativité. Le site conseille aussi de "fixer un cadre et définir des limites adaptées à chaque période de la vie

Retrouvez ici la liste des dispositifs et structures pour adolescents à La Réunion

ma.m/www.ipreunion.com/redac@ipreunion.com

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