Lettre ouverte au Premier ministre suite aux émeutes

Nassimah Dindar demande "des solutions urgentes, réalistes et pérennes"

  • Publié le 21 février 2013 à 06:55

Dans une lettre ouverte adressée au Premier ministre Jean-Marc Ayrault, la présidente du conseil général Nassimah Dindar, note que "La Réunion connaît un regain de tension et un mouvement de colère se traduisant par des barrages routiers et des incidents dans plusieurs communes". Elle attire l'attention du gouvernement "sur la nécessité d'apporter des solutions urgentes, réalistes et pérennes, à notre population en souffrance". Nous publions ci-dessous cette lettre.

"Monsieur le Premier ministre,

Depuis plusieurs jours, La Réunion connaît un regain de tension et un mouvement de colère se traduisant par des barrages routiers et des incidents dans plusieurs communes. Un nouveau palier a été franchi la nuit dernière du 19 au 20 février, avec l'incendie d'une mairie annexe sur la commune du Port.

La situation est malheureusement loin d'être exceptionnelle : il y a à peine un an, des mouvements identiques avaient été enregistrés dans 20 des 24 communes de l'île.

Dès son élection, le Président de la République François Hollande a érigé en priorités l'emploi et la .jeunesse et s'est engagé à "redonner de l'espoir dans les quartiers". Vous avez vous-même relayé cette volonté, hier, 19 février, lors du Comité Interministériel des Villes, en annonçant 27 décisions en faveur de la banlieue en matière d'emploi, d'éducation ou encore de poursuite de la rénovation urbaine. L'axe central de ces mesures est de mieux orienter les moyens existants vers les quartiers les plus en difficultés. Parmi ces mesures, vous avez annoncé l'identification de 1000 quartiers prioritaires pour votre nouvelle politique de la Ville et la création de 2000 "emplois francs ". "Le gouvernement n'abandonnera pas les habitants des banlieues ", avez-vous déclaré.

Nous attendons de vous, fidèle à votre engagement, que vous n'abandonniez pas les habitants de La Réunion, département sinistré par une crise économique et sociale qui perdure ! Avec 49 % de sa population vivant en-dessous du seuil de pauvreté, avec 45% de sa population âgée de moins de 30 ans, avec 60% de ses jeunes de moins de 25 ans au chômage, avec un taux de décrochage scolaire de 12%, soit le double de la moyenne nationale, notre département peut être tristement qualifié de " grande banlieue" de la France. La Réunion tout entière répond aux critères que vous avez vous-même fixés en termes de revenus, de pyramide des âges et de taux de chômage.

Nos jeunes ne sont ni des vandales ni des désoeuvrés! A travers eux, c'est La Réunion de la souffrance qui s'exprime, celle des exclus! Mais ces mêmes jeunes peuvent devenir les acteurs de La Réunion de l'excellence si des réponses satisfaisantes sont apportées à leurs légitimes attentes.

Aussi, nous vous demandons de considérer les quartiers de La Réunion comme "quartiers prioritaires" parmi les prioritaires. J'attire votre attention sur la nécessité d'apporter des solutions urgentes, réalistes et pérennes, à notre population en souffrance. La mise en œuvre concertée de ces solutions devra faire l'objet d'une réunion, placée sous l'autorité de l'Etat, associant parlementaires, communes et collectivités.

Je suis convaincue que vous saurez prendre la mesure du désespoir qui s'exprime actuellement et dont le constat avait été déjà dressé dans le "Livre Blanc de l'Urgence Sociale" que je vous avais transmis lors de votre prise de fonction.

Dans cette attente, je vous prie de croire, Monsieur le Premier ministre, à l'expression de ma haute considération et de mon profond respect".

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