Alors que quatre fonctionnaires doivent être entendus par l'IGPN

Le Port : les syndicats de police déplorent un manque de soutien et de moyens

  • Publié le 14 février 2014 à 17:54

Dans les milieux policiers comme ailleurs, on attend les conclusions de l'enquête de l'IGPN (Inspection générale de la police nationale) avant de s'exprimer sur les événements ayant coûté un oeil au jeune Steve, le 1er février dernier au Port. En revanche, les syndicats pointent d'ores et déjà le manque de soutien de la hiérarchie auprès de leurs collègues mis en cause et reposent le problème d'un flagrant manque de moyens humains et matériels, constaté lors de ces échauffourées au Port, mais valable selon eux dans l'ensemble de l'île.

Depuis quelques jours, l’ambiance est plutôt morose au sein du commissariat du Port, où l’on trouve des fonctionnaires amers, un peu abattus, quatre de leurs collègues de la brigade anti-criminalité (BAC) devant être entendus ces jours-ci par les enquêteurs de l’IGPN. L’un d’eux a notamment été directement mis en cause dans la presse par le jeune Steve, touché par un tir de flash-ball lui ayant coûté un œil dans la nuit du 1er au 2 février au Port.

Au sein de la police, alors que les fonctionnaires en question nient avoir poursuivi et frappé l'adolescent, on déplore d'abord le manque de soutien d’une hiérarchie très discrète dans cette affaire. "Il y a un sentiment d’abandon. Nos collègues ont été pointés du doigt et on aurait aimé qu’ils soient soutenus par la hiérarchie", souligne ainsi Gilles Clain, secrétaire départemental du syndicat Unité SGP Police – Force ouvrière. "On attend les résultats de l’enquête, mais nos collègues restent présumés innocents, comme tout citoyen, et on leur apporte tout notre soutien", ajoute-t-il.

Cette affaire dramatique repose également la question du manque de moyens policiers à La Réunion, déjà soulevée par les policiers lors d’un rassemblement de protestation le 22 janvier dernier devant le commissariat Malartic de Saint-Denis. Car lors des faits que l’IGPN devra éclaircir, l’équipage de la BAC du Port – une équipe de jour, mais mobilisée la nuit – s’est retrouvé bien isolé au milieu des manifestants.

"Lors de cette soirée au Port, il y avait en tout moins de 20 policiers mobilisés... Si on était plus nombreux, il y aurait plus de prévention, de dissuasion et moins d’actes criminels", estime ainsi Gilles Clain, rejoint par son collègue Aldo Bègue, secrétaire départemental du syndicat Alliance Police Nationale : "Si nous étions plus nombreux peut-être que ce genre de situation ne serait pas arrivé", confirme-t-il.

"La police n’est plus la police"

Ce ressentiment n’est d’ailleurs pas spécifique à la police. Au sein de la population portoise aussi, on déplore un manque d’effectif flagrant, ne permettant même pas aux pompiers d’intervenir efficacement pour éteindre les incendies allumés ici et là par les fauteurs de trouble. D’où un risque bien plus élevé que la situation ne dégénère. Et d’où l’impression d’une ville "laissée à l’abandon", en proie à ces groupes de jeunes. Le sentiment, aussi, d’être peut-être moins considéré que dans d’autres communes.

"Il y a effectivement une problématique sur la commune du Port, mais comme dans d’autres communes, comme à Saint-Denis, Saint-André ou Saint-Pierre", nuance toutefois Aldo Bègue. "Il y a des problèmes d’effectif au Port, mais comme dans toutes les circonscriptions police de La Réunion", abonde Gilles Clain.

Pour les syndicats de police, cette question du manque de moyens concerne bien toute l’île et pose de très sérieux problèmes. "On manque de fonctionnaires, on n’arrête pas de le dire et rien n’est fait pour renforcer le nombre de policiers", déplore Aldo Bègue. "On continue à bricoler avec les effectifs dont on dispose et du matériel qui demande à être remplacé. Les grenades comme celle qui a blessé un policier au Port datent de 2008 et ont en théorie une durée d’utilisation de 5 ans. Elles auraient donc déjà dû être changées", ajoute-t-il.

Pour les fonctionnaires, le constat est sans appel, "la police n’est plus la police", comme le dit le représentant d’Alliance. "Comment voulez-vous qu’on se fasse respecter alors qu’on n’a pas les moyens de répondre ?", s’interroge-t-il. Et pour son collègue d’Unité SGP-FO aussi, "la population réunionnaise ne bénéficie pas des effectifs suffisants pour assurer sa sécurité". "On estime qu’il manque environ 200 fonctionnaires à La Réunion...", conclut-il.

www.ipreunion.com

guest
1 Commentaires
Rémi
Rémi
10 ans

"Comment voulez-vous qu’on se fasse respecter alors qu’on n’a pas les moyens de répondre ?"
Même avec des moyens de répondre, utilisés dans un cadre légal, la police sera toujours mise en cause avec le soutien à peine dissimulé de l'opinion publique qui aime "taper" sur ses policiers.