La faute aux variants (actualisé)

Covid-19 : l'immunité collective encore possible, mais difficilement atteignable

  • Publié le 9 décembre 2021 à 11:48

L'immunité collective, brandie en début de pandémie comme la solution ultime pour sortir de la crise Covid, n'est plus la même que celle dont on parlait début 2020. L'évolution du virus, l'apparition régulière de nouveaux variants, la résistance des vaccins mise à épreuve... Tous ces ingrédients poussent à penser que "l'immunité collective" peut toujours être atteinte, mais elle doit être abordée sous un spectre différent. Quoiqu'il en soit, les scientifiques s'accordent là-dessus, la vaccination seule ne suffira pas à éradiquer le virus. (Photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

C'était un chiffre symbolique, un cap pour le gouvernement en début de pandémie : atteindre un taux de vaccination suffisant en France afin de pouvoir envisager une diminution des courbes et peut-être un jour éradiquer le virus.

Aujourd'hui 88,5% des Français de plus de 12 ans - soit la population éligible - affichent un schéma vaccinal complet. A La Réunion, ce taux est de 73,7%. Pourtant la Métropole fait face à une cinquième vague de Covid-19, comme un peu partout en Europe. A La Réunion, les courbes de l'épidémie s'envolent depuis la fin du mois d'octobre. "Le virus possède encore un espace de circulation" admet l'agence régionale de santé (ARS) de La Réunion.

Alors cela veut-il dire que l'immunité collective, en tout cas telle qu'on la présentait en début de pandémie, n'est plus atteignable ? En presque deux ans de Covid-19, les choses ont changé et même le gouvernement semble être plus frileux sur ce sujet.

• Une population (totale) insuffisamment vaccinée

Les chiffres affichés correspondent bien au taux de vaccination pour la population éligible, soit de plus de 12 ans. Rappelons qu'elle n'est ouverte aux 12-17 ans que depuis le 15 juin 2021. Ainsi difficile de viser une immunité de groupe quand toute une tranche de la population, jeune, en l'occurrence les 5-11 ans, est privée de vaccin. Lors de sa conférence de presse du 25 novembre, le ministre de la Santé Olivier Véran a admis que la vaccination des jeunes enfants était à l'étude.

Lors de sa nouvelle conférence avec Jean Castex lundi 6 décembre, il a finalement été question de la vaccination des jeunes enfants, qui pourrait être possible pour les plus fragiles dès le 15 décembre, et à partir du 20 décembre pour les autres.

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Il faut aussi rajouter que l'opposition au vaccin se montre encore tenace par certains endroits, notamment dans les territoires ultramarins. C'est le cas dans les Antilles : en Guadeloupe comme en Martinique les taux de vaccination se situent sous la barre des 35%.

• L'arrivée des variants

L'apparition des variants a également bouleversé notre vision du virus. Britannique d'abord, puis sud-africain, brésilien, indien… Tous ont occasionné à des échelles plus ou moins larges des reprises épidémiques. Aujourd'hui c'est le variant baptisé Omicron, identifié pour la première fois en Afrique du Sud le 25 novembre, et qui a déjà été détecté dans plusieurs pays, qui fait parler de lui. A La Réunion, trois cas ont été confirmés dont un autochtone. Pour le ministre de la Santé Olivier Véran, interrogé sur le plateau de franceinfo, le variant Omicron "circule probablement depuis plusieurs semaines".

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Plus agressifs, plus contagieux, notamment le bien connu Delta, les variants entraînent une baisse d'efficacité des vaccins. LCI rappelait dès le mois de septembre que selon des données publiées le 24 août dernier, l'efficacité de Pfizer et Moderna contre l'infection "a baissé de 91% à 66%" avec la domination du Delta aux Etats-Unis. Dans le temps, l'efficacité du sérum diminue également : "de 88% à 74% au bout de cinq à six mois pour Pfizer, et de 77% à 67% après quatre à cinq mois pour AstraZeneca" selon une étude britannique.

D'où la nécessité du rappel vaccinal, disponible pour toutes les personnes majeures en France depuis samedi 27 novembre 2021. Un vaccin "apprend à votre corps à fabriquer des armes contre le virus, des anticorps. Au bout d'un certain temps, l'efficacité diminue, la mémoire immunitaire n'est pas infaillible. Dans le cadre des vaccins contre le Covid, il faut donc renouveler ce rappel" détaillait Olivier Véran, ministre de la santé, le 25 novembre dernier.

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Le variant Omicron "possède plusieurs dizaines de mutations à la fois sur l’ARN codant la protéine Spike et la protéine N. Trop peu de données sont disponibles à ce jour et il faut attendre encore pour savoir s’il est plus contagieux que le variant Delta et s’il arrive à contourner ou non l’immunité naturelle acquise contre les autres variants et l’immunité vaccinale contre les contaminations et contre les cas sévères" estime l'ARS de La Réunion. "En Afrique du Sud, la contagiosité semble élevée, mais la sévérité limitée. Ce sont des premières données après 3 à 4 semaines d’observation : il faut donc rester vigilants." La mise au point d'un nouveau vaccin dédié à la lutte contre ce variant n'est pas exclue par les firmes pharmaceutiques.

• La vaccination ne suffira pas

Le 10 août dernier, Andrew Pollard, directeur du groupe de recherche Oxford Vaccine Group, déclarait devant les parlementaires britanniques que l'immunité collective était un "mirage". Des propos polémiques qui ont mis la communauté scientifique en émoi.

"La vision que l’on peut avoir de l’immunité de groupe aujourd’hui n’est malheureusement pas celle d’il y a dix-huit ou même six mois", expliquait en août dernier Alain Fischer, président du Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale, au Journal du Dimanche. C'est le cœur du sujet : l'immunité peut encore être atteinte, mais sous une autre forme.

Mais le vaccin seul ne suffira pas. Même l'Académie nationale de médecine le concède : "on sait à présent que la vaccination ne permettra pas d’éradiquer le SARS-CoV-2" écrivait-elle en septembre dans un communiqué. Pour autant l'immunité collective n'est pas "un objectif illusoire" défend-elle. L'Académie invite par ailleurs à transformer le pass sanitaire en pass vaccinal, rendant dès lors illégitimes les tests négatifs pour accéder à certains lieux et la vaccination seul sésame valable.

Ce mercredi 8 décembre 2021, le président du conseil scientifique Jean-François Delfraissy a lui aussi rappelé que la vaccination ne suffirait pas à stopper la cinquième vague en Métropole.

• Une immunité qui change de forme

Les études passent et les vaccins perdent en efficacité au fur et à mesure que des variants sont découverts. L'épidémiologiste Antoine Flahault expliquait à l'AFP le calcul à réaliser, à partir du taux de reproduction de base du virus appelé R0. Il s'agit du nombre de personnes qui peuvent être contaminées par un seul malade.

Avec la souche historique du Covid-19, l'immunité collective était estimée à 66% car le R0 était de 3 : il faut donc considérer que les deux tiers de la population doivent être vaccinés. Mais avec le variant Delta, majoritaire en France depuis juillet 2021, les lignes ont bougé et l'immunité collective ne se situe plus au même palier. Le R0 passe à environ 8 : il faudrait donc que 90% de la population totale soit vaccinée.

Une donnée confirmée par l'ARS de La Réunion. "Le variant Delta, avec une contagiosité accrue, a augmenté le seuil d’immunité globale qu’il faut atteindre : il faudra sans doute plus de 90% de la population immunisée pour stopper la circulation virale" nous dit-on.

• Le vaccin barrière principale malgré tout

Les scientifiques insistent cependant : si le vaccin ne suffit plus aujourd'hui, il doit rester un réflexe pour la population. En effet pour "tendre" malgré tout vers l'immunité collective, il faut entraîner notre système immunitaire via la production d'anticorps à résister au virus, même si celui-ci se manifeste à travers une forme mutante et donc plus résistante.

D'autant que les vaccins, s'ils ne sont pas omnipotents, diminuent fortement les formes graves de la maladie, ce qui n'est plus à prouver dans les hôpitaux. A La Réunion par exemple, malgré une forte vague de contaminations en plus, les entrées en réanimation restent stables. Les décès cependant on augmenté cette semaine avec sept patients morts des suites du virus. Le taux d'incidence, lui, ne fait que grimper et dépasse aujourd'hui 350 pour 100.000 habitants.

"L’immunité collective dépend à la fois du niveau de la couverture vaccinale et de l’immunité naturelle acquise chez les non vaccinés" indique l'ARS. "Cette dernière semble pouvoir durer plusieurs mois (dernière étude COMCOR de l’institut Pasteur parue dans le Lancet), mais avec une protection qui tourne autour de 65 à 70% pour éviter les recontaminations. L’immunité vaccinale protège contre les contaminations à hauteur de 70%, et contre les formes sévères à plus de 90%."

mm/www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

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8 Commentaires
Eve
Eve
2 ans

Nouveau protocole pour l'Assurance maladie : en cas de doute sur un potentiel nouveau cas positif au variant Omicron, sans attendre l'arrivée du résultat du séquençage, les cas contact devront s'isoler même s'ils sont vaccinés. Le but ' Ralentir au maximum la propagation d'Omicron.

HULK
HULK
2 ans

Arrêtons de parler "d'immunité collective". C'est encore une invention d pseudos-scientifiques qui racontent n'importe quoi. Tout le monde le sait, mais on continuels médias en tête, à nous remettre çà à l'ordre du jour. Un peu d'honnêteté intellectuelle et vous serez plus crédibles.

Politico
Politico
2 ans

Le sakicovid ne va pas arranger la situation ! Bravo aux organisateurs qui ne pensent qu'à leurs poches

Pastrite
Pastrite
2 ans

Bonjour,Pourquoi l'article n'est pas signé '

domtom
domtom
2 ans

Ce mercredi 8 décembre 2021, le président du conseil scientifique Jean-François Delfraissy a lui aussi rappelé que la vaccination ne suffirait pas à stopper la cinquième vague en Métropole. !!!! ........... A quoi sert le passe sanitaire ''

Jacques
Jacques
2 ans

Plus vous vaccinerez, et plus il y aura de variants. C'est plusieurs éminents spécialistes qui l'affirment, comme on ne doit pas vacciner en pleine pandémie. Le virus, il n'est pas idiot, il s'adapte, mute, et veut lui aussi survivre.

Covid ou Prozac
Covid ou Prozac
2 ans

Des anciens conseillers techniques d'ine collectivité ne trouvent plus le sommeil depuis quelques jours. Le Covid n'est pour rien dans l'affaire.

Miel vert et Sakifo
Miel vert et Sakifo
2 ans

Tampon à reporté Miel vert et St Pierre maintient Sakifo.